La foi reprend ses quartiers à la Maison-Blanche
Créé par le président Georges W. Bush, remanié sous Barack Obama, et largement délaissé par Donald Trump, le «bureau des partenariats confessionnels et de voisinage» de la Maison-Banche retrouve ses lettres de noblesse avec Joe Biden. Le 14 février dernier, le nouveau président américain a signé un décret dans lequel il rétablit le bureau. L’objectif: «travailler avec des leaders de différentes confessions et de différents milieux qui sont en première ligne de leurs communautés en crise et qui peuvent nous aider à guérir, à nous unir et à reconstruire», a déclaré Joe Biden. Cette décision intervient à la suite des réactions émises notamment lors du traditionnel Petit-déjeuner de prière national début février, qui a notamment réuni des chefs religieux et décideurs politiques pour discuter de religion et durant lequel les souffrances physiques et économiques généralisées dues à la pandémie de coronavirus, au racisme et au changement climatique, ont été déplorées.
«Une nation ne peut pas simplement rester sans rien faire et regarder la souffrance autour d’elle. Ce n'est pas ce que nous sommes. Ce n'est pas ce que la foi nous appelle à être», a affirmé le président américain le 14 février. «Nous avons encore de nombreuses nuits difficiles à supporter. Mais nous les traverserons ensemble et avec la foi qui nous guidera à travers les ténèbres et vers la lumière», a-t-il ajouté.
La direction exécutive du bureau est assumée par l’avocate et chercheuse Melissa Rodgers, qui retrouve le poste qu’elle occupait entre 2013 et 2017 sous Barack Obama. Elle endosse aussi le rôle de directrice pour la foi et la politique publique au sein du conseil de politique intérieure de la Maison-Blanche. À ses côtés, Josh Dickson, qui a dirigé les activités de sensibilisation à la foi dans le cadre de la campagne Biden-Harris, est nommé directeur adjoint. Trey Baker, qui a travaillé comme directeur national de l'engagement afro-américain pour la campagne de Biden, assure, quant à lui, la liaison entre le bureau de la Maison-Blanche et les communautés noires américaines, dont les groupes religieux.
L’objectif du bureau est notamment de renforcer les collaborations existantes entre le gouvernement et les organisations religieuses pour faire face à la pandémie de Covid-19. «Nous sommes en train de développer du matériel que nous nous efforçons de diffuser largement, qui ne fait que partager des informations et des faits sur le vaccin et qui contribue à fournir des ressources importantes pour l'éducation sur le Covid-19», a précisé Trey Baker. Outre la lutte contre la pandémie, le bureau concentrera ses efforts sur l'aide aux communautés défavorisées, l'avancement du travail humanitaire mondial, le renforcement du pluralisme et la protection des «garanties précieuses de séparation entre l'Église et l'État et de liberté pour les personnes de toutes confessions et de toutes origines».
Le bureau travaillera également avec des partenaires religieux et laïques pour remédier aux inégalités en matière d'opportunités économiques et éducatives. «Nous serons engagés dans cet effort particulier, ainsi que d'autres, pour briser les silos et communiquer entre les agences gouvernementales afin d'essayer de trouver ce que nous pouvons faire avec nos partenaires pour nous assurer que nous nous attaquons réellement à ces disparités, qui font partie du fléau du racisme systémique», a déclaré Melissa Rogers. L’annonce faite par la Maison-Blanche précise que le travail sera mené avec les centres pour les partenariats confessionnels et de voisinage intégrés dans onze agences du gouvernement fédéral.
Depuis sa création, le bureau a changé plusieurs fois d’appellation, chaque président accordant aux organisations religieuses et laïques des degrés d'accès variables, favorisant le contact avec un large éventail de groupes confessionnels et interreligieux.
Durant le mandat de Donald Trump, le bureau est resté largement sans personnel jusqu'en 2019, lorsqu'il a fait appel à la prédicatrice pentecôtiste et conseillère de longue date de Donald Trump, Paula White, pour superviser ce qu'il a appelé «l'Initiative Foi et Opportunité». Jusqu'à cette date, la plupart des activités religieuses de président consistaient en des réunions informelles avec des chefs religieux, pour la plupart chrétiens, dont un petit noyau connu sous le nom de conseillers évangéliques non officiels.
Melissa Rogers n’avait pas hésité à critiquer ce qu'elle considérait comme un engagement disproportionné de Donald Trump avec les évangéliques, déclarant en 2017 que «le maintien de ce conseil consultatif exécutif évangélique, même officieusement, et l'absence apparente d'une entité comparable ouverte aux non-évangéliques, envoie un message troublant selon lequel l'administration préfère les évangéliques aux autres personnes de foi». La nouvelle directrice exécutive s'était également opposée aux plans de l'administration Trump visant à supprimer l'exigence selon laquelle les prestataires de services sociaux confessionnels doivent offrir une alternative laïque aux personnes qui demandent leur aide. «Vous ne pouvez pas bénéficier de protections auxquelles vous ignorez avoir droit», avait-elle tweeté en janvier 2020. «La liberté religieuse des bénéficiaires de services sociaux est aussi importante que celle des prestataires de services religieux».
En août dernier, elle avait pris la défense du candidat Biden, arguant que Donald Trump avait fait des «affirmations sauvages» sur l'ancien vice-président pendant la campagne 2020. Elle a déclaré que les affirmations de Donald Trump selon lesquelles Biden aurait une approche de la foi «sans religion, sans rien» s'il devenait président «ne pourraient pas être plus fausses».