L’Eglise protestante ferme Le LAB, jugé trop exclusif
L’«espace pour jeunes adultes ouvert, inclusif et progressiste» de l’Eglise protestante de Genève (EPG) – connu sous l’appellation «Le LAB» et installé au temple de Plainpalais –fermera ses portes le 31 décembre. Telle est la décision prise par le Conseil du Consistoire (exécutif) de l’EPG, le 7 novembre, et divulguée jeudi dernier par le pasteur responsable du lieu, Nicolas Luthi dans un billet de blog publié sur le site Réformés.ch.
«Je ne sais pas si je suis dans le déni, mais je n’accepte pas cette mort», écrivait-il, se montrant aussi bien opposé à la suppression de son ministère que désireux d’«éviter de réagir avec violence à cette décision». Il appelait ainsi sa communauté de «gens fidèles ou de passage» à «réagir ensemble» lors d’un «premier rassemblement» prévu le soir même dans un restaurant genevois – rendez-vous qu’’il était également possible de suivre en visioconférence.
Lors de cette soirée, la présence du pasteur Emmanuel Rolland, secrétaire général adjoint à la Mission de l’EPG, a suscité une certaine émotion chez les quelques paroissiens présents. Avouant «faire partie des personnes qui ont décidé de cette fermeture», celui-ci a d’ailleurs été vertement interpellé par l’un d’entre eux: «L’Eglise serait-elle devenue antiféministe et LGBT-phobe?» «Absolument pas», a assuré le pasteur, en saluant «l’inclusivité vécue par Le LAB», tout en insistant sur le fait que «l’inclusivité n’est pas l’apanage d’un ministère mais de toute l’EPG».
Pour autant, si ce lieu se félicite d’avoir «accueilli inconditionnellement les marges», comme l’écrivait Nicolas Luthi dans son appel, ce souci pour les minorités serait justement devenu le problème. «Initialement pensé comme une pastorale jeunesse, Le LAB est devenu un lieu dédié au militantisme. Or faire communauté ne signifie pas communautarisme», a tenté d’expliquer Emmanuel Rolland. «Nous souhaitons un lieu sans bannière afin d’accueillir toute la jeunesse. Ce que l’on est en droit d’attendre d’un ministère jeunesse, c’est moins du militantisme que la transmission du patrimoine biblique.»
«Ces derniers temps, Le LAB s’est trop éloigné de sa mission d’origine en centrant ses actions plus fortement sur le militantisme en lien avec certaines questions sociales», exprime à son tour Chantal Eberlé, présidente de l’EPG. «Or notre souhait est que notre ministère jeunesse se concentre sur les besoins spirituels des nouvelles générations et les accompagne dans leur croissance spirituelle.»
Le 6 octobre, le journal «20 minutes» révélait que des actes de vandalisme avaient été perpétrés sur une fresque classée du temple de Plainpalais, lors d’une rencontre à l’occasion de la grève des femmes. Questionnée sur le sujet, Chantal Eberlé dément tout lien entre ce dérapage et la fermeture du LAB, se disant toutefois «choquée» par ces déprédations. «L’EPG condamne fermement cet incident que nous avons choisi de régler à l’interne. Mais il n’est en rien lié à la décision de fermer le LAB. Celle-ci s’inscrit dans un processus de réflexion et de consultations qui dure depuis plusieurs mois.»
Enfin, promettant une «offre renouvelée», Chantal Eberlé assure que «la jeunesse reste une priorité pour l’EPG», et qu’un «nouveau ministère» sera mis en place en 2024. Pour sa part, Nicolas Luthi a lancé une pétition en ligne pour «maintenir l’existence» du ministère actuel. De leurs côtés, la pasteure Carolina Costa (cofondatrice du LAB) et Adrian Stiefel (responsable de l’antenne LGBTI), ont préféré ne pas commenter.