Une association proche des Attestants français voit le jour en Suisse
Photo: CC(by-nc-nd) Bart Bernardes
«Dans l’Eglise réformée, il y a des gens qui ont été blessés et dont il faut prendre soin; il y a des gens qui ont soif de spiritualité et avec lesquels je fais route; et puis, il y a aussi beaucoup de gens qui ont une parole belle, forte, vraie, qui ont des convictions, qui ont des projets et qui méritent davantage d’audience que seulement leur petit lieu d’Eglise. Notre idée est donc de fédérer et mettre en réseau les apports des uns et des autres», résume le pasteur retraité Gérard Pella pour décrire les objectifs de l’association nouvellement créée R3, rassemblement pour un renouveau réformé, dont il est membre du comité.
Successeur du Forum évangélique réformé et du Mouvement de Cugy — qui avait lancé une pétition contre le rite pour couples de même sexe dans l’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) — ce groupe s’est constitué en association à la fin de l’année passée. Il tiendra à Saint-Loup sa première assemblée le 14 avril prochain durant laquelle seront rendus publics le manifeste et les statuts de l’association. Les personnes se reconnaissant dans leurs valeurs pourront adhérer à cette association aujourd’hui essentiellement active sur le canton de Vaud, mais qui souhaite, à terme, relier des personnes de toute la Suisse romande par ses publications et ses rencontres.
Groupe de croyants attachés à une vie communautaire en Eglise, ils réaffirment l’autorité des textes bibliques. Ils appellent à accueillir les Ecritures avec une raison priante et aimante, rejetant les lectures «historico-critiques et anthropocentrique» des textes bibliques pour lesquelles «tout n’est qu’humain dans la Bible», mais également les interprétations spirituelles ou fondamentalistes pour lesquelles «tout n’est que divin dans la Bible». R3 revendique une certaine proximité avec Les Attestants, un courant de l’Eglise protestante unie de France (EPUdF), visant à faire contrepoids aux libéraux. Les Attestants ont été fondés peu après l’adoption d’une bénédiction pour couples de même sexe par l’EPUdF.
Il y a quelques semaines, il y a eu la création du mouvement Pertinence qui défend un christianisme libre, critique et démocratique, en prise sur les réalités d’aujourd’hui. «Cela nous a réjouis, au comité de R3», note Gérard Pella. «Nous accueillons favorablement que les différentes couleurs théologiques de l’Eglise s’affichent enfin. C’est signe de transparence.» Une affirmation qui ne devrait pas nuire au travail en Eglise. «Durant ma carrière à l’EERV, j’ai toujours travaillé dans des paroisses “multicolores” où plusieurs ministres de tendances différentes collaboraient. Les paroissiens appréciaient cette diversité.»
Mais pourquoi créer cette association plutôt que de s’engager dans les organes existants de l’Eglise tel que le synode? «Cela a été notre première tentation, quand on vu avec quel mépris a été traitée notre pétition contre le rite pour couple de même sexe. Mais nous avons pris un moment de réflexion. Il nous a fallu près de deux ans pour gérer cette blessure et nous rendre compte que ce que nous voulons c’est un renouveau de l’Eglise, pas la changer.» Le manifeste fustige toutefois le fonctionnement démocratique des Eglises réformées: «Nous croyons que l’Eglise n’est pas d’abord un Parlement (dans lequel une majorité triomphe des minorités), mais un espace de communion. C’est pourquoi nous recherchons d’autres manières de vivre ensemble et de nous organiser, et nous voulons promouvoir la prise de décision par consensus.»