Un banc se promène au Val-de-Travers
Photo: Le banc, à la grande salle de Couvet © David Allisson
«Le banc est déjà sorti à «l’intérieur» lors d’une revue à la grande salle de Couvet». C’est par ces mots étonnants que David Allisson, pasteur de la paroisse du Val-de-Travers, commence à expliquer son curieux projet. Ce nouveau paroissien pas comme les autres, qui loge dans l’église réformée de Môtiers, a effectivement quitté sa bâtisse pour assister à la revue paroissiale, le 12 mars dernier. Il y jouait même un rôle central lors de cette soirée où il a reçu sa mission, celle de sortir des murs et susciter des rencontres.
Et c’est après une célébration d’envoi en mission, le dimanche 20 mars, à Noiraigue que le banc a pu officiellement partir à l’aventure. Une fois le culte fini, il s’est posé sur la place de la gare pour accueillir les randonneurs. Ce dimanche-là, il faisait beau et ce paroissien boisé a interpelé. Des curieux se sont installés quelques instants sur lui et ont échangé avec les personnes présentes.
Des sorties et des rencontresCes balades et activités ne vont pas s’arrêter là. Le Conseil paroissial a plusieurs variantes: laisser le banc avec un carnet de bord pendant plusieurs jours au même endroit, ou bien faire des sorties ponctuelles. «C’est une occasion d’exposer un peu plus l’Eglise et de participer en même temps davantage à la vie sociale de la région», explique David Allisson. Une association avec les catholiques lors du comptoir du Val-de-Travers en fin d’été est également envisagée. Pour le moment, les discussions sont encore en cours et rien n’est définitif dans les différents engagements du banc.
Sa mission est d’aller à la rencontre des personnes qui ne viennent pas volontiers à l’église. En effet, «des gens préfèrent croire à leur façon ou ne veulent absolument pas entrer dans une église, et c’est une manière de les rejoindre», confie David Allisson. Il est très important de «ne pas avoir d’idées préconçues lors des rencontres», poursuit-il. Promeneurs, passants, pratiquants ou non, ayant une vie spirituelle ou pas, tous sont invités à s’asseoir sur ce banc, pour converser ou partager un moment. «Il n’y a pas l’idée d’évangéliser, mais d’écouter et d’échanger», précise le pasteur.
Les fresh expressions of ChurchC’est en écoutant une conférence de Sabrina Müller, pasteure qui a fait son doctorat sur les fresh expressions of Church (les nouvelles expressions de l’Eglise) que David Allisson a entendu parler d’un projet avec un banc d’Eglise. En effet, ce concept n’est pas nouveau. Dans la paroisse de Bäretswil (ZH) qui était alors celle de Sabrina Müller, l’un des bancs d’Eglise a pu, entre autres, aller à la kermesse du village. Les passants étaient invités à s’y asseoir et surtout à le signer. «Il était impossible d’imaginer faire la même chose au Val-de-Travers, parce que cela abimerait le banc», confie le Neuchâtelois. «C’est pourquoi nous avons repris l’idée en l’utilisant à notre façon» précise-t-il.
Cette initiative de promener un banc s’apparente aux mouvements des fresh expressions of Church, de nouvelles formes de communauté ecclésiale qui se sont développées à l’intérieur des Eglises traditionnelles Anglo-saxonnes, dont l’Eglise anglicane. Avec ces mouvements, «l’important est d’imaginer et de reconnaître de nouvelles formes d’Eglise dans lesquelles les gens peuvent être Eglise sans aller à l’église», explique David Allisson. Les paroisses traditionnelles et ces nouvelles formes de communauté sont l’Eglise, les unes et les autres. Et l’idée du banc va exactement dans ce sens puisque, comme conclut le pasteur, «c’est entendre des personnes que l’on n’entend pas, car elles ne participent pas ou peu aux activités paroissiales, c’est discuter librement avec elles et être ouvert aux rencontres».