Le coronavirus a eu raison de la messe
La nouvelle est tombée brutalement, vendredi après-midi, la veille de l’événement historique qui devait se tenir, ce samedi 29 février à la cathédrale Saint-Pierre de Genève. Pour la première fois depuis 500 ans, une messe allait avoir lieu dans l’édifice protestant, haut-lieu de la Réforme: le réformateur Calvin y avait notamment lui-même prêché. L’épidémie du coronavirus est cependant venue bousculer les plans des Églises réformée et catholique genevoise, qui souhaitaient par-là donner un signal œcuménique puissant.
Vendredi 28 février, le Conseil fédéral a en effet décidé d’interdire, sur tout le territoire suisse, les manifestations de plus de 1000 personnes. Contacté dans la foulée, le vicaire Pascal Desthieux, qui devait présider cette messe, confirme la décision: «La messe de samedi est annulée. Nous attendions 1500 personnes. Nous sommes évidemment obligés de nous plier aux décisions sanitaires qui sont prises.» Comment l’abbé a-t-il pris la nouvelle? «Nous avons choisis avec les responsables de l’Église protestante de Genève (EPG) d’agender immédiatement une autre date: cet événement n’est donc pas annulé, mais reporté provisoirement au samedi 30 mai, le samedi de la Pentecôte.» Et d’ajouter, sur le ton de la plaisanterie: «C’est plus embêtant pour la personne qui s’occupe de la soupe, elle était déjà en train de couper les légumes! J’étais tout désolé de devoir prendre cette décision!»
Contacté par téléphone, Blaise Menu, pasteur de l’EPG et modérateur de la Compagnie des pasteurs et des diacres, réagit à la nouvelle: «Nous n’avons pas à juger de cette décision du Conseil fédéral, mais juste à nous y conformer.» De son côté, la direction de l’EPG est par ailleurs en train de rédiger une série de consignes à l’adresse de leur personnel: «Nous recommandons que l’usage de la coupe ne soit que symbolique pour l’officiant. Et si la cène est maintenue, il faudra qu’elle soit servie uniquement avec des gobelets individuels.» Le pasteur n’a «pas envie de céder à la psychose, mais si on peut modestement contribuer à éviter des maladresses sanitaires tout en maintenant une certaine quiétude sociale, c’est tant mieux». Il s’interroge cependant «sur ce qui pourrait advenir si un gros service funèbre devait se présenter ces prochaines semaines…»
Du côté catholique, d’autres mesures préventives sont également en train d’être prises en lien avec leurs propres rites, nous informe encore le pasteur genevois, notamment la décision de «vider les bénitiers, on sait à quel point l’eau est vecteur de microbes». Par ailleurs, depuis l’épidémie du virus H1N1, les prêtres ont pris l’habitude de ne plus déposer l’hostie directement dans la bouche des fidèles, mais de la remettre dans leurs mains.
Oui aux gobelets, non aux cacahuètes
Du côté vaudois, l’Exécutif de l’Église évangélique réformée du Canton de Vaud (EERV) a invité, vendredi 28 février, leurs ministres à prendre au sérieux la menace de propagation du coronavirus et à prendre en conséquence des mesures adaptées. La principale inquiétude est liée à la communion, soit le partage du vin et du pain: «Les rencontres d’Église, les cultes et les célébrations de la cène notamment représentent des vecteurs facilitant la transmission du virus», explique-t-il. Et de détailler les mesures de précaution recommandées: «Lors de la distribution de la communion, procéder soit par intinction (l’officiant trempe le pain dans la coupe avant de le donner au paroissien), soit en utilisant des gobelets individuels.» Il est également demandé aux ministres et autres officiants de «ne pas inciter les paroissiennes, paroissiens à des contacts directs (poignée de main, baiser de paix, plats de cacahuètes ou autres lors d’apéritifs, …).»