Conseil synodal vaudois: est-ce qu’il y a quelqu’un?
«De toute l’histoire de notre Eglise, quatre démissions dans une même législature, ça ne s’était jamais vu», déclare Olivier Leuenberger, ancien président du Synode (organe législatif) de l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV) et actuel président de sa commission des finances. En effet, les trois démissions du Conseil synodal (Exécutif) annoncées cet automne, dont celle de la présidente Marie Claude-Ischer, suivaient la défection d’un autre conseiller synodal, depuis remplacé. Le pourquoi de ces départs? Si des raisons de santé et de surcharge de travail ont été invoquées, il a aussi été question d’une gouvernance devenue trop compliquée, notamment à cause de tensions entre le Conseil synodal et le Synode — qui fonctionnent pourtant selon un modèle démocratique.
Une situation qui, selon Vincent Guyaz, vice-président du Conseil synodal, n’est pas réellement source d’inquiétude pour la base de l’Eglise. «Cela suscite évidemment quelques préoccupations, mais je crois pouvoir dire que ces problèmes n’intéressent pas nos membres au premier chef, car ils ont surtout à cœur de faire vivre la mission, et que tout se passe bien dans leurs paroisses respectives», commente-t-il. Et d’ajouter: «Circulez, y a rien à voir, c’était le sentiment, en décembre, de la majorité de nos membres.» De son côté, Laurence Kohli, la plus jeune déléguée au Synode, parle de conseillers synodaux «au bout du rouleau». La preuve à ses yeux que «d’importants changements sont à effectuer dans le modèle de gouvernance de l’EERV».
Les postes à repourvoir, que les récents démissionnaires quitteront au mois d’août, doivent impérativement réunir deux laïcs et un ministre (diacre ou pasteur). «Une connaissance minimale de la culture institutionnelle de l’Eglise, de son histoire et de son règlement est également nécessaire», comme le rappelle Simon Butticaz, vice-doyen de la Faculté de théologie et de sciences des religions de l’Université de Lausanne et délégué au Synode. Et si Vincent Guyaz évoque, pour ces futurs candidats, la nécessité d’avoir «le cuir épais», il est avant tout attendu de la part des laïcs «d’aménager leur temps de travail, afin de pouvoir y intégrer le pourcentage horaire voulu par leur mandat», ajoute Simon Butticaz. «De plus, l’EERV étant devenue un employeur à part entière depuis 2007, il est également demandé à son Exécutif de réelles compétences métier.»
Pour Xavier Paillard, c’est bien là que le bât blesse. Selon l’ancien président du Conseil synodal, «l’EERV peine visiblement à trouver des personnes ayant les compétences requises. Par certains aspects, elle est devenue comme une entreprise dans un monde concurrentiel et a besoin d’un management professionnel à sa tête.» Toutefois, selon Olivier Leuenberger, «il conviendrait d’examiner la possibilité, pour le Conseil synodal, de ne gérer que la stratégie de l’Eglise, un peu à la manière du conseil d’administration d’une société anonyme (SA). Ainsi les ressources humaines et les finances pourraient être confiées, en parallèle, aux chefs de service, qui peuvent être engagés sur la base de leurs compétences métier.» Xavier Paillard évoque encore les difficultés actuelles du «pilotage» qui incombe au Conseil synodal, et que le Synode empêcherait «quasi systématiquement». Pour lui, «la majorité des ministres et des paroissiens n’est pas prête à accepter une direction. Tant que les mentalités ne changeront pas, toute personne accédant au Conseil synodal sera mise en échec dès qu’elle essaiera d’assumer ses responsabilités.»
Le délai de dépôt de candidatures est fixé au 10 février, les élections étant prévues lors du Synode des 10 et 11 mars. Vincent Guyaz se montre pessimiste: «Il est peu probable que dans ces délais, on ait plus de candidatures que de postes à pourvoir.» Ce qui, pour Simon Butticaz, «peut représenter un écueil, au cas où certains profils seraient inadaptés à la fonction». En effet, selon l’actuel règlement de l’EERV, «le Synode n’est pas appelé à voter pour ou contre un candidat. De fait, faute de concurrence, un candidat pourrait être élu au second tour d’une élection, avec une seule voix», commente Sylvie Arnaud, présidente du Synode. «Je veux croire qu’un candidat désapprouvé au premier tour par le Synode se retirera, par bon sens et souci de l’institution», confie Line Dépraz, pasteure à la cathédrale de Lausanne et ex-conseillère synodale. Laurent Zumstein, actuel conseiller synodal, se montre quant à lui moins confiant: «Les candidatures fantaisistes ne sont jamais à exclure.»
Pour l’heure, trois personnes se seraient montrées intéressées à siéger au Conseil synodal. Toutefois, Sylvie Arnaud met en garde: «Il faut encore que ces intérêts se transforment en candidatures.»