Côté chaire, côté rue et désormais côté bains!
Par Joël Burri
«Calvin n’est pas arrivé à Genève et “pouf”, la réforme a eu lieu», sourit Anouk Dunant Gonzenbach, archiviste aux archives d’État de Genève. «Dès 1520 les idées luthériennes qui se répandent, engendrent à Genève une ferveur religieuse. Un mouvement aussi motivé par des raisons politiques, puisqu’il s’agissait d’échapper au Duc de Savoie. La Réforme n’est donc pas la seule cause du changement à Genève», a souligné l’historienne, jeudi 17 mai lors de la soirée de vernissage de l’exposition à voir jusqu’au 17 juin aux Bains des Pâquis à Genève.
Épargnées par les guerres, les incendies ou les inondations, les archives de Genève sont d’une qualité exceptionnelle. Les procès-verbaux du Petit Conseil (ancêtre du Grand Conseil actuel) sont ainsi disponibles sans discontinuité depuis 1409, et les archives de l’Église protestante de Genève permettent de remonter à 1542 sans interruption. C’est ce patrimoine, largement disponible en ligne, que l’exposition «Coté chaire, côté rue. La Réforme à Genève, 1517-1617» a voulu mettre en évidence en 2017 à l’occasion du jubilé de la Réforme.
Les thématiques choisies insistent sur le lien entre vie religieuse et vie quotidienne. Ainsi l’on y apprend l’importance accordée au chant religieux comme outil d’unification ou qu’en 1546 le Consistoire a essuyé un échec cuisant en voulant transformer les tavernes de la ville en lieux de prière.
Lorsque cette exposition a fermé ses portes, le pasteur Jean-Michel Perret a eu l’envie de partager son contenu avec un public plus large. D’où l’idée d’en tirer un condensé à présenter aux Bains des Pâquis. «Comme pasteur j’aime prendre ses biens à l’Église pour les partager avec le plus grand nombre», compare-t-il. Et cette volonté de partager l’histoire ecclésiale avec tous les Genevois est soumise au plus grand sérieux. «L’information que vous avez ici sur la Réforme est fiable. Elle a été traitée avec sérieux par des historiens. Elle n’est pas dénaturée par des objectifs religieux ou politiques!»
Les panneaux créés pour cette version sont illustrés par des photos de l’artiste Jean Stern. «Il s’agit d’une relecture du présent, avec toute la subjectivité que les historiens n’ont pas le droit d’avoir», explique-t-il. Les images sont donc à lire comme des «feuilletages» qui font dialoguer idées modernes avec le passé où elles trouvent leurs racines. «Les archives sont un outil formidable. C’est un tamis. En tamisant nos préjugés, on tombe parfois sur des pépites», a-t-il déclaré jeudi soir lors du vernissage de l’exposition. Une soirée qui s’est achevée par un concert du duo Aliose, dont le chanteur Xavier Michel, également historien, a participé à la réalisation de cette exposition.
Calvin aurait-il imaginé que près de 500 ans après les faits, l’on viendrait en costume de bain réfléchir à l’héritage qu’il a laissé à la ville?
Côté Librairies
L’exposition de 2017 a également donné naissance à un ouvrage: «Côté chaire, côté rue– L’impact de la Réforme sur la vie quotienne à Genève (1517-1617)» aux éditions La Baconnière. (Disponible dès la semaine prochaine en Suisse et courant juin en France). «Il ne s’agit pas d’un catalogue d’exposition», prévient Laurence Gudin, directrice de La Baconnière. «22 thèmes ont été choisis. Ils montrent l’impact de la Réforme sur la vie quotidienne. Un texte présente la thématique et des documents d’archives sont retranscrits à la suite.» Place des femmes ou des enfants, contrôle de la vie intime, registre d’état ou place des étrangers sont autant de thématiques qui sont abordées dans cette publication.
Côté pratique
«Rendre la réforme aux Genevois» à voir du 17 mai au 17 juin 2018 aux Bains des Pâquis, 30 quai du Mont-Blanc.
Visites accompagnées jeudi 24 mai 12h15, mercredi 30 mai 18h, mercredi 13 juin 18 et jeudi 14 juin 12h15. Rendez-vous devant la rotonde.