Des prêtres anglicans demandent du soutien auprès des syndicats

Des prêtres anglicans demandent du soutien auprès des syndicats

Face à la pression croissante, certains ministres anglicans vont chercher de l’aide auprès de syndicats pour les travailleurs

Photo: La série «La vie d’un prêtre»

(RNS/Protestinter)

Londres — L’archevêque de Canterbury, à la tête de l’Église d’Angleterre et de la Communion anglicane, a été entrepreneur pour une grande compagnie pétrolière avant de devenir prêtre. Ce précédent travail était sans aucun doute des plus stressants, se rappelle Justin Welby. «J’étais isolé, c’était exigeant et je travaillais bien souvent sans collègues proches». Travailler dans ce type d’environnement est «pour beaucoup d’employés particulièrement éprouvant et épuisant».

Ce genre de pression pourrait expliquer pourquoi de plus en plus de prêtres dans l’Église d’Angleterre cherchent de l’aide en dehors de l’Église pour résoudre leurs problèmes. Face aux exigences de leurs assemblées, le peu de congés, des tas de paperasses et des procédures disciplinaires qu’ils ressentent souvent comme injustes, les prêtres se tournent désormais vers les syndicats pour trouver du soutien. D’après un des plus grands syndicats britanniques, Unite, le nombre de travailleurs religieux a explosé cette dernière année. Près de 1'500 prêtres ainsi que quelques rabbins et imams ont rejoint le syndicat l’année passée – une augmentation de 16% en 12 mois.

Les ministres anglicans s’affilient malgré le fait qu’ils ne dépendent pas des droits du travail britanniques usuels. Ils ne sont pas considérés comme des «fonctionnaires» et ne peuvent pas porter plainte auprès du tribunal de l’emploi. Bien qu’ils ne peuvent pas jouir de mêmes droits que les autres membres de Unite, ils peuvent demander des conseils et du soutien.

Des pressions de tous les côtés

Selon le révérend Peter Hobson, à la tête du secteur des travailleurs religieux chez Unite, qui défend les intérêts du clergé de l’Église d’Angleterre, les pasteurs se tournent vers le syndicat parce qu’ils subissent des pressions de tous les côtés, que ce soit de la par des personnes sur les bancs ou de leurs évêques. «C’est une vocation, mais c’est aussi un rôle très difficile», constate Peter Hobson. «La charge de travail est immense. Dans ce monde de consommateurs, les gens s’attendent à ce que vous traitiez leurs demandes immédiatement, et l’évêque, même s’il est un religieux, joue également un rôle de directeur. Parallèlement, l’approche managériale prend de plus en plus d’ampleur».

Selon Peter Hobson, cette approche rend plus difficile la relation entre le clergé et les évêques. Le clergé a de plus en plus besoin de conseils extérieurs à l’Église, quand il y a des tensions autour de leur travail. Dans ce genre de cas, Unite peut les aider. Alors que les pressions sur les prêtres dans les grandes villes sont considérables, car les fidèles changent tout le temps, ce sont les ministres à la campagne qui souffrent le plus. «Nous sommes dans un monde post-chrétien et dans les régions rurales, de plus en plus de paroissiens sont gérés par un seul prêtre», ajoute-t-il.

Ses propos se retrouvent également dans une série de documentaires télévisés de six épisodes, qui vient de commencer à la télévision britannique. Intitulée «La vie d’un prêtre», la série se concentre sur le travail de quatre ministres dans le diocèse du Herefordshire, la région la plus rurale de l’Angleterre, à côté du Pays de Galles. On constate que les prêtres, malgré le fait qu’ils travaillent dans une Angleterre paisible, idyllique et rurale, subissent de lourdes pressions liées à leur rôle.

Six paroisses simultanément

La plupart de ces prêtres ont la charge de six paroisses simultanément et font de grandes distances pour aller prêcher d’un endroit à l’autre. Le documentaire souligne également les problèmes des sans-abri, du chômage et de la solitude dans la campagne anglaise, avec beaucoup de gens qui se tournent vers l’église pour obtenir de l’assistance, surtout depuis les importantes coupes dans les aides sociales.

Un des prêtres du documentaire, le révérend Matthew Cashmore qui récemment encore travaillait comme directeur éditorial, considère que le rôle de prêtre est très exigeant. «L’église est en train de redécouvrir sa fonction et montre un amour inconditionnel aux gens de manière pratique», constate-t-il, tout en reconnaissant l’importance de cette démarche qui génère malheureusement beaucoup de pression.

Après avoir fait une carrière dans l’industrie, Sarah Jones qui n’apparaît pas dans le documentaire est prêtre dans le diocèse du Hereford. Elle est responsable de trois paroisses dans la pittoresque ville de Ross-on-Wye. «Honnêtement, je dirais que mon travail actuel est le plus difficile de ma carrière». Non seulement les prêtres travaillent six jours par semaine, mais en plus ils sont «toujours joignables sur appel».

«Les gens aujourd’hui attendent et exigent une réponse immédiate quand ils nous contactent. Et certains n’hésitent pas à exprimer leur colère envers le clergé ce qu’ils ne feraient jamais face à d’autres personnes. Ils pensent que nous devons toujours tendre l’autre joue». Sarah Jones pense également que les ministres en campagne ont une vie très stressante. «La majorité d’entre nous estime que nous faisons un meilleur travail lorsque nous collaborons avec des collègues. S’occuper seul de cinq ou six paroisses est très difficile».

Sarah Jones fait partie des religieux anglicans qui ont rejoint le syndicat Unite. Elle se sent rassurée d’avoir désormais ce soutien supplémentaire. Même si elle croit que les évêques interviennent effectivement quand un de leurs prêtres vit une véritable crise, elle craint que «le système actuel ne permette plus d’offrir une assistance pastorale à long terme». Une chose aide néanmoins Sarah Jones: «la prière et les Écritures sont le meilleur remède possible pour gérer le stress».