Les personnes homosexuelles, malvenues dans les Eglises du Zimbabwe

Les personnes homosexuelles, malvenues dans les Eglises du Zimbabwe

Alors que le Zimbabwe est officiellement laïque, il est dominé par des croyances chrétiennes conservatrices qui condamnent l’homosexualité
Stigmatisés et violentés, les gays peinent à trouver des Eglises qui les accueillent.

Photo: LDD

Harare, Zimbabwe, RNS/Protestinter

Boudés par leur famille, méprisés dans les médias d'Etat et considérés comme «pires que des chiens et des cochons» par l'ex-président Robert Mugabe, les homosexuels au Zimbabwe trouvent souvent les Eglises de leur pays tout aussi hostiles. De nombreux gays vivant avec le VIH constatent que leur état ne suscite pas l'empathie des responsables religieux, en lesquels ils avaient pourtant placé un espoir de réconfort.

Certains prétendent que cela devient de plus en plus difficile d'être accueilli par une Eglise. «Mon petit ami, Oscar Gumbo, est décédé l’année dernière à l'âge de 23 ans, il a succombé au SIDA», raconte Liberty Siziba, un séropositif de 26 ans qui vit à Harare, la capitale du Zimbabwe. «Personne de notre Eglise, la Word of life international ministries, s’est donné la peine d'assister à son enterrement. L'Eglise savait que nous étions dans une relation gay, mais les prédicateurs avaient l’habitude de nous attaquer indirectement, à chaque fois qu'ils prêchaient», a-t-il ajouté.

Liberty Siziba a visité plus de vingt Eglises dans l’espoir de trouver un lieu accueillant, mais en vain. Des membres de la congrégation racontent systématiquement des ragots sur lui et lui demandent d’un ton accusateur comment il a été infecté par le VIH, le virus qui cause le sida - même s’ils savent que son partenaire a succombé à cette maladie. «Ma pratique religieuse a été rendue difficile», constate-t-il.

Quelques Eglises accueillantes

Toutefois, les Eglises de ce pays d'Afrique australe ne sont pas toutes hostiles aux minorités sexuelles. Certaines, comme la Grace tidings international, une Eglise pentecôtiste à Harare, ont accueilli les minorités sexuelles à bras ouverts. Pour ces Eglises, la lutte contre le sida ne connaît aucune sexualité. «Des personnes gays et lesbiennes fréquentent notre église. Nous ne pratiquons aucune discrimination contre eux. De plus, ils participent également à nos programmes pour combattre le VIH et le SIDA parce que nous savons que certains d'entre eux sont infectés par la maladie», a souligné Jameson Tarembwa, le fondateur et responsable de la Grace tidings international.

Trish Mugwenhi, une lesbienne de 32 ans vivant avec le SIDA, a cherché et trouvé du réconfort dans l'Eglise. «Quand je suis tombée gravement malade après la chute de mon taux de CD4, une protéine de la famille des immunoglobulines, mon Eglise m'a aidé à acheter des médicaments à l'extérieur du pays», raconte-t-elle, se référant à sa déficience immunitaire. «Je suis ici grâce à ce qu’ont fait beaucoup des responsables religieux, comme le pasteur Tarembwa, pour mon amie et moi. Ils nous soutiennent malgré le fait que beaucoup d'autres personnes nous traitent comme des parias». «Il n'y a pas de meilleure Eglise comme maison», a ajouté sa partenaire Tracy Chiwira.

Une condamnation sévère

Toutefois, la position majoritaire parmi les pasteurs du Zimbabwe est une condamnation sévère de l'homosexualité et la croyance que les gays sont responsables de leur propre souffrance et de celle des autres. «Tu ne coucheras pas avec un homme comme avec une femme; c'est une abomination», a déclaré Denis Sibanda, pasteur à l'Eglise réformée du Zimbabwe, citant le Lévitique 18:22. «Il est prouvé que les homosexuels ont apporté le SIDA dans ce monde, alors que Dieu a toujours condamné de telles relations. Si un homme couche avec un homme comme avec une femme, tous les deux ont commis une abomination; ils seront certainement mis à mort», a le pasteur, se référant au Lévitique 20:13.

Le groupe Les homosexuels et les lesbiennes du Zimbabwe (GALZ) travaille à l'abrogation des lois antigays que ces croyances religieuses imposent. «En tant que GALZ, nous estimons que les croyances chrétiennes d'une majorité de Zimbabwéens ne peuvent pas servir de base pour criminaliser les relations entre les adultes de même sexe», a relevé Chesterfield Samba, le directeur du groupe. Il a souligné que le Zimbabwe était officiellement une nation laïque, avec une constitution qui appelle à la liberté de conscience et de croyances.

«Les opinions religieuses d'une partie de la population, qu'elle soit majoritaire ou non, ne peuvent pas être imposées à toute la société zimbabwéenne». Et pourtant, c’est le cas. Bien qu'il ne soit pas illégal d'être gay au Zimbabwe, il est illégal de se comporter comme tel. Et les Zimbabwéens homosexuels sont fréquemment battus et arrêtés. La constitution elle-même interdit le mariage homosexuel.

De son côté, Liberty Siziba est toujours à la recherche d'une Eglise qu’il pourrait considérer comme sa «maison». «Il y a des moments où j'ai besoin de consolation spirituelle en raison de ma maladie, mais personne ne veut vraiment prier avec moi parce que pour la plupart des fidèles, je suis considéré comme un pécheur en raison de mon orientation sexuelle».