Le plus ancien séminaire des Etats-unis va se séparer de son campus

Le plus ancien séminaire des Etats-unis va se séparer de son campus

Le déclin des dénominations traditionnelles du protestantisme se répercute sur les inscriptions dans les formations pastorales issues de ces traditions. Le besoin d’une formation moins coûteuse se fait sentir.

Photo: ©RNS/Andover Newton Theological School

RNS/Protestinter

Une fois encore, la plus ancienne faculté de théologie des Etats-Unis trace un sillon que d’autres institutions du protestantisme historique ne tarderont pas à suivre. Mais cette fois, c’est un chemin que ces instituions préféreraient ne pas prendre. Mi-novembre, la faculté de théologie Andover Newton a présenté un plan pour reloger l’institution et vendre son campus de huit hectares à Newton (Massachusetts). Ce déménagement fait partie des «projets novateurs et ambitieux» de la nouvelle direction de l’école qui existe depuis 208 ans et fait face à de lourds déficits. Pour Martin Copenhaver, président d’Andover Newton, «Dieu prépare quelque chose de nouveau. Nous devons comprendre ce que c’est et nous adapter à Son programme.»

Quel que soit ce que Dieu est en train de préparer, cela se fera avec une faculté plus petite, moins de frais généraux et de nouveaux partenariats. Deux options sont actuellement étudiées. Rattacher la faculté à une institution plus stable, telle que la Divinity School de l’Université Yale, avec laquelle des pourparlers sont en cours. Ou alors passer à un modèle d’enseignement coopératif, qui nécessite moins de ressources. Cette dernière option serait d’avoir une offre de cours dépouillée, centrée sur quelques matières essentielles. Le reste de l’apprentissage se ferait dans les congrégations locales.

Dans tous les cas, l’évolution de Andover Newton est comparable à ce qui attend probablement 80% des séminaires américains d’obédiences protestantes historiques (luthériens, presbytériens, réformés, épiscopaux, etc.) selon Daniel Aleshire, directeur général de l’Association des écoles théologiques. Construits il y a plus d’un siècle, ces écoles se basent sur un modèle d’enseignement en internat qui sont rapidement devenus hors de prix et mal adapté aux demandes actuelles des étudiants. «Andover Newton trace probablement la route autour de la question “quel est l’avenir des institutions du protestantisme historique?”», estime Daniel Aleshire. «Nous allons voir des écoles de telles obédiences chercher à collaborer avec de plus grandes institutions. Cela leur permettra de réduire leurs coûts indirects.»

Andover Newton est loin d’être le seul séminaire à rechercher une nouvelle vie grâce aux restructurations et aux gains d’efficacité. Début novembre, la fédération de séminaires Bexley Seabury a annoncé qu’en 2016, elle mettrait fin à ses enseignements à Columbus dans l’Ohio pour consolider sa présence à Chicago. Ce séminaire épiscopal dont l’histoire est marquée par les fusions et les déplacements loue actuellement des locaux à l’Eglise évangélique luthérienne d’Amérique à Chicago.

Mais pour Daniel Aleshire, Andover Newton est confrontée à une difficulté nouvelle: plus précisément les retombées de décennies de diminutions des appartenances aux dénominations protestantes historiques. Depuis 2005, les inscriptions dans les séminaires des branches traditionnelles du protestantisme ont diminué de 24%, selon lui. La principale raison en est le déclin de ces dénominations.

Jusqu’à récemment, les séminaires traditionnels pouvaient compter sur les adhésions et les frais de scolarité d’étudiants qui espéraient obtenir des postes de ministres à plein-temps après leur diplôme. Mais désormais, les pasteurs à temps partiel deviennent la norme dans ces congrégations, car avec la diminution du nombre de fidèles, elles ne peuvent plus se permettre d’engager des pasteurs à plein temps. De moins en moins d’étudiants sont prêts à souscrire des crédits d’études à 5 chiffres pour finalement n’espérer que des postes à temps partiel. Alors ils ne s’engagent plus dans ces formations. «Le déclin confessionnel est à la source de ce qui se passe aujourd’hui», explique Daniel Aleshire. «Désormais, ce phénomène a duré suffisamment longtemps, il a été suffisamment constant et il a été suffisamment massif pour qu’il touche les séminaires.»

La nouvelle direction de Andover Newton hérite de 10 ans de déclin des inscriptions, ce qui s’est traduit par une diminution des revenus pour couvrir les nombreux coûts fixes. Aujourd’hui, l’école accueille 225 étudiants, pour la plupart à temps partiel, alors qu’ils étaient 450 à plein temps il y a une génération. L’école compte maintenant sur une hypothèque pour payer ses factures tout en essayant de préserver les 18 millions de dollars de son fonds de dotation. Même le passage au modèle d’enseignement coopératif pourrait ne pas suffire pour être économiquement viable ou adaptable, s’inquiète Martin Copenhaver.

Mais pour certains observateurs, l’Eglise d’aujourd’hui a besoin de quelque chose de nouveau pour former correctement des pasteurs sans qu’ils soient criblés de dettes. Et qu’ils puissent ainsi se permettre de travailler à temps partiel. Si Andover Newton parvient à proposer un modèle qui réponde à ces besoins, l’institution deviendra une référence. «Cette période est difficile pour les écoles autonomes», estime Don Richter, directeur associé de l’Institut de Louiseville, un centre de recherche pour la revitalisation des institutions chrétiennes américaines. «A moins que vous soyez le séminaire de Princeton et que vous disposez d’une dotation énorme, vous vous porterez beaucoup mieux si vous êtes la divinity school d’une université complète qui porte toutes les infrastructures.»