L’Eglise protestante de Genève sort de la logique de la peau de chagrin

L’Eglise protestante de Genève sort de la logique de la peau de chagrin

Dans une situation financière difficile, l’Eglise protestante de Genève a choisi d’employer la manière forte. Aboutissement de plusieurs débats, le Consistoire a adopté un train de mesures visant à réduire drastiquement ses ressources humaines ainsi qu’un budget serré. L’Eglise se recentre sur ses missions de base.

Photo: Daniel Jolivet CC(by)

«Nous ne voulons pas faire la même chose avec moins, nous voulons faire différemment!», c’est ainsi que Charlotte Kuffer, présidente du Conseil du Consistoire (exécutif) de l’Eglise protestant de Genève (EPG) résumait devant le Consistoire (organe délibérant) le train de mesures adopté. Réunis en novembre, en février et finalement jeudi et vendredi au temple de Malagnou, les membres du Consistoire ont validé des mesures qui poursuivent deux objectifs: revoir les priorités de la mission afin d’adapter son insertion dans la société; réduire de 3 millions de francs les dépenses structurelles de leur Eglise d’ici à 2020.

Le Consistoire, suivant le Conseil, fait ainsi siennes la plupart des propositions du rapport «vision et priorité de la mission» commandité à une Commission du Consistoire, l’an dernier en parallèle à la décision d’un plan de redressement financier sur sept ans.

Le constat principal est que l’EPG est passée de «l’Eglise de Genève» à une Eglise à Genève. Elle doit donc muer en une Eglise de témoins dans une société profondément modifiée, multi-culturelle et multi-spirituelle. A cette fin, son projet se décline en plusieurs axes: la manière de célébrer un culte, la notion d’appartenance, la façon d'être présent dans la société, l’approche de la spiritualité, etc: «Nous ne voulons pas nous enfermer dans une logique de la peau de chagrin, et réduire peu à peu, dans la frustration, notre budget. Nous voulons nous donner les moyens d’oser travailler différemment», résume Charlotte Kuffer.

Aucun licenciement

Quant au plan de redressement, il stipule une réorganisation stricte, qui verra le nombre de postes ministériels passer à 40 contre 50 actuellement, se fera sans licenciement. Dès cet automne, les régions et les services occuperont le nombre de ministres qui leur reviendront à long terme. En outre, ils pourront faire valoir leurs demandes pour des projets innovants, correspondant aux priorités décidées en Consistoire, pour lesquels 13 postes seront dédiés. Ces postes dits «d’appuis», correspondront aux nombres de postes excédentaires qui disparaitront d’ici à 2017 à la suite de départs à la retraite. Cela ne veut pas dire qu’ils seront tous occupés par des pasteurs en fin de carrière.

Le Consistoire a également adopté sans grande discussion un budget correspondant à ces objectifs d’économie. Un budget strict qui a soulevés deux inquiétudes. D’une part, le passage de 400’000 à 350’000 francs du financement de la faculté de théologie et d’autre part le fait que, sur le budget 2014/2015, la subvention de la Fondation des Temples d’avant 1907 reste nulle.

Pour la troisième fois depuis 1994, l’aide à la faculté de théologie a été diminuée de 50'000 francs. Une diminution loin d’être anodine puisque pour chaque franc versé par l’EPG, l’Université en verse trois. Charlotte Kuffer a toutefois rassuré le Consistoire sur ce point. Le Collège de théologie qui assure la formation académique des futurs pasteurs de Suisse romande s’appuyant en grande partie sur les professeurs engagés par la faculté de Genève, les Eglises des cantons voisins seront invitées à participer, elles aussi, à ce financement. «Nous ne pouvons pas payer cash la décision de la faculté de Lausanne de se réorienter sur les sciences des religions», a-t-elle résumé.

Bâtiments hors de prix

Quant à l’absence de financement pour la Fondation des Temples d’avant 1907, il a pour conséquence que celle-ci ne peut désormais plus financer les études préliminaires à toute restauration. Et sans ce chiffrement des travaux nécessaires, impossible de lancer un appel au don pour assurer une restauration. Devant cette inquiétude, Charlotte Kuffer avoue que «nous irons devant le Conseil d’Etat, en tant qu’Eglise. Le zéro sur la ligne est un signe évident que nous sommes à la fin du systèmes mis en place lors de la séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1907.» Mais avant cela l’EPG devra mener une réflexion sur ses besoins. «La raison d’être de l’Eglise protestante de Genève n’est pas la conservation du patrimoine immobilier du canton, c’est avant tout la proclamation de l’Evangile. Nous n’avons plus les moyens d’entretenir tous nos temples et presbytères classés», tranche Charlotte Kuffer.


Genevois et Vaudois feront informatique commune

L’Eglise protestante de Genève adoptera la même solution informatique que l’Eglise évangélique réformée vaudoise pour son site internet. Pour des raisons de coût notamment, elle a ainsi choisi de changer d’approche par rapport au projet initialement prévu. Point fort de la solution vaudoise une gestion simplifiée des horaires des cultes et autres événements qui évitera une double saisie pour la publication dans la presse des tabelles cultes. Eric Vulliez, codirecteur de l’EPG, responsable des finances, de l’immobilier et de l’informatique espère qu’à terme cette solution sera adoptée par l’ensemble des Eglises réformées romandes. Lors de la présentation, plusieurs paroisses ont toutefois fait part de leur crainte de devoir abandonner leur site au profit d’un modèle cantonal.
Vente du Centre œcuménique des Avanchets

L’affaire n’est pas encore signée, mais Eric Vulliez, codirecteur de l’EPG, responsable des finances, de l’immobilier et de l’informatique tenait à en informer les membres du Consistoire en primeur: le Centre œcuménique des Avanchets sera vendu. Propriété à parts égales d'une paroisse de l'Eglises catholique et de l'EPG, celui-ci pesait lourd sur les finances. De plus, pour l’EPG elle se trouvait à distance raisonnable d’autres lieux d’Eglise. Church for the nations s’est portée acquéreuse de ce bâtiment. Il s’agit d’une Eglise pentecôtiste fréquentées par des personnes travaillant dans les organisations internationales. Elle est actuellement basée à la rue de Lausanne. Eric Vuillez se réjouit que ce bâtiment garde sa vocation d’Eglise chrétienne. L’EPG y louera un local pour assurer une permanence dans le quartier.Cet article a été publié dans :

Le quotidien Le Courrier dans son édition du 22 mars 2014.

Cet article a également été cité sur le site web de la Tribune de Genève, le 6 avril 2014.