L'histoire de la colonie de Plymouth traduite en français: Comment l'épopée du Mayflower a renforcé le sentiment d'élection des Américains
En 1620, une poignée de réformés anglais, zélés et pieux, en quête de la terre promise où ils projettent d’établir une communauté chrétienne « régénérée », s’embarque pour le Nouveau Monde à bord du Mayflower
L’utopie évangélique des pèlerins échouera mais leur épopée servira à construire le mythe fondateur de la nation américaine. « L’histoire de la colonie de Plymouth », rapportée par l’un des pèlerins, William Bradford, vient d’être traduite en français. Un texte éclairant pour comprendre l’Amérique d’aujourd’hui.Plymouth Plantation dans le Massachussetts, deux jours après le 11 septembre 2001 : sous le choc, les employés en costume d’époque se recueillent au milieu des masures reconstituées pour les touristes en quête de leurs racines. Tous sont là, du forgeron qui répond aux touristes dans un anglais élisabéthain rugueux et fait mine d’ignorer l’américain contemporain, aux scieurs de long. Venue en touriste au village, je garde un souvenir fort de ces Américains en pleurs dans leur costume de pèlerins, unis dans le malheur, à l’image de la communauté initiale des « élus de Dieu » débarqués du Mayflower. Je me trouvais à un moment crucial de l'histoire contemporaine au cœur même d’un lieu emblématique, là où naquit le mythe fondateur des origines, véritablement forgé au 19e siècle pour renforcer le sentiment d’élection des Américains.
L’épopée de ces colons que l’on commémore dans toutes les Etats-Unis a été rapportée par l’un d’entre eux, William Bradford (1590-1657), qui fut gouverneur de la communauté à plus de trente reprises. Son « Histoire de la colonie de Plymouth » vient enfin d’être traduite en français. Elle couvre un demi-siècle. Elle raconte l’exil, la traversée de l’Atlantique à laquelle beaucoup ne survécurent pas, l’installation en plein hiver dans la baie de Plymouth, le froid, la famine, les épidémies. Elle donne un éclairage sur la genèse des relations avec les Indiens, qui se détériorent dès que des colons peu scrupuleux leur volent leur maïs ou leur vendent des armes qui se retourneront contre les colons. Elle est empreinte de cette foi à laquelle les puritains se raccrochent dans l’adversité et de ce sentiment d’être élu par Dieu. Elle témoigne enfin du rejet assez rapide du système communautariste pour la propriété privée, et de l’écroulement de l’utopie évangélique. La nature humaine, avec ses ombres, a rattrapé les puritains qui avaient cru pouvoir éradiquer le péché.
Aventuriers et puritains: l'unité impossibleSur le vaisseau qui échoua sur la péninsule du Cap Cod ne se trouvaient d’ailleurs pas que des protestants zélés qui voulaient qu’on « purifiât » l’Eglise d’Angleterre, ce qui leur valut le sobriquet de « puritains » à partir des années 1560. Partis à l’aventure outre-Atlantique dans le seul but de fuir la précarité et les persécutions religieuses du début du 17e siècle, ils se retrouvèrent avec tout un contingent d’aventuriers montés à bord sur ordre de la compagnie d’investisseurs qui finançaient le voyage, de façon à augmenter les chances de survie de l’expédition sur place. Le Mayflower était censé faire route vers la Virginie comme le stipulait la patente qu’avaient obtenue les pèlerins en février 1620. Or le navire n’a jamais jeté l’ancre sur les côtes de Virginie mais au sud-est de Boston. Ce qui provoqua une mutinerie à bord.Le capitaine avait-il volontairement dévié de sa route, sur l’ordre de quelques-uns, ou s’était-il véritablement ensablé au large du Cap Cod ? Un contrat, rédigé dans l’urgence, fut passé entre les puritains et les aventuriers pour éviter que la communauté n’explose, ce qui aurait compromis sa survie. Ce pacte fut considéré ultérieurement comme le texte fondateur de la démocratie américaine. Ce qu’il n’était en aucune façon, comme le démontre dans sa préface Lauric Henneton, spécialiste du puritanisme en Nouvelle-Angleterre. « On fit de ces pèlerins des héros et de martyrs de la liberté, explique l’historien, confondant un peu vite la liberté de conscience que les colons revendiquaient pour eux, certainement pas pour les autres, et la liberté politique, dont il n’est évidemment pas question en 1620 ».
Le récit de Bradford est accompagné, dans cette édition en français, d’un appareil critique qui permet de mettre l’épopée en perspective et d’établir des parallèles avec la mentalité puritaine de l’Amérique de Georges Bush, qui s’érige volontiers en donneuse de leçons tout en servant strictement ses intérêts.
L’épopée de ces colons que l’on commémore dans toutes les Etats-Unis a été rapportée par l’un d’entre eux, William Bradford (1590-1657), qui fut gouverneur de la communauté à plus de trente reprises. Son « Histoire de la colonie de Plymouth » vient enfin d’être traduite en français. Elle couvre un demi-siècle. Elle raconte l’exil, la traversée de l’Atlantique à laquelle beaucoup ne survécurent pas, l’installation en plein hiver dans la baie de Plymouth, le froid, la famine, les épidémies. Elle donne un éclairage sur la genèse des relations avec les Indiens, qui se détériorent dès que des colons peu scrupuleux leur volent leur maïs ou leur vendent des armes qui se retourneront contre les colons. Elle est empreinte de cette foi à laquelle les puritains se raccrochent dans l’adversité et de ce sentiment d’être élu par Dieu. Elle témoigne enfin du rejet assez rapide du système communautariste pour la propriété privée, et de l’écroulement de l’utopie évangélique. La nature humaine, avec ses ombres, a rattrapé les puritains qui avaient cru pouvoir éradiquer le péché.
Aventuriers et puritains: l'unité impossibleSur le vaisseau qui échoua sur la péninsule du Cap Cod ne se trouvaient d’ailleurs pas que des protestants zélés qui voulaient qu’on « purifiât » l’Eglise d’Angleterre, ce qui leur valut le sobriquet de « puritains » à partir des années 1560. Partis à l’aventure outre-Atlantique dans le seul but de fuir la précarité et les persécutions religieuses du début du 17e siècle, ils se retrouvèrent avec tout un contingent d’aventuriers montés à bord sur ordre de la compagnie d’investisseurs qui finançaient le voyage, de façon à augmenter les chances de survie de l’expédition sur place. Le Mayflower était censé faire route vers la Virginie comme le stipulait la patente qu’avaient obtenue les pèlerins en février 1620. Or le navire n’a jamais jeté l’ancre sur les côtes de Virginie mais au sud-est de Boston. Ce qui provoqua une mutinerie à bord.Le capitaine avait-il volontairement dévié de sa route, sur l’ordre de quelques-uns, ou s’était-il véritablement ensablé au large du Cap Cod ? Un contrat, rédigé dans l’urgence, fut passé entre les puritains et les aventuriers pour éviter que la communauté n’explose, ce qui aurait compromis sa survie. Ce pacte fut considéré ultérieurement comme le texte fondateur de la démocratie américaine. Ce qu’il n’était en aucune façon, comme le démontre dans sa préface Lauric Henneton, spécialiste du puritanisme en Nouvelle-Angleterre. « On fit de ces pèlerins des héros et de martyrs de la liberté, explique l’historien, confondant un peu vite la liberté de conscience que les colons revendiquaient pour eux, certainement pas pour les autres, et la liberté politique, dont il n’est évidemment pas question en 1620 ».
Le récit de Bradford est accompagné, dans cette édition en français, d’un appareil critique qui permet de mettre l’épopée en perspective et d’établir des parallèles avec la mentalité puritaine de l’Amérique de Georges Bush, qui s’érige volontiers en donneuse de leçons tout en servant strictement ses intérêts.