L'UDC en guerre contre le manuel d'enseignement biblique Enbiro: Deux visions de la religion à l'école
Les conseillers nationaux UDC Jacques Pagan (GE) et Yvan Perrin (NE) étaient venus à Aigle épauler Jean-Charles Kollros, chef de file du mouvement d’opposition au manuel en Valais, et Oskar Freysinger (UDC Valais), alors que leurs cantons respectifs ne sont pas concernés par le débat puisqu’on n’y enseigne pas le fait religieux à l’école. Ils accusent en vrac les auteurs d’avoir fait du manuel qu’ont approuvé les responsables des Eglises catholique romaine, catholique chrétienne et protestante, un modèle « d’ethno- masochisme »,un méchoui multiculturel, d’y avoir fait figurer, dans les deux pages consacrées aux femmes, les « thèses féministes » du Parti Socialiste et des différents Bureaux de l’Egalité de Suisse romande, enfin de cautionner le rapport Bergier qu’ils qualifient de façon erronée de « révisionniste ». Ils reprochent aussi aux auteurs d’avoir mis sur un pied d’égalité le judaïsme, le christianisme et l’islam et de semer ainsi la confusion dans les jeunes esprits, de ne pas chercher à enraciner les enfants dans la tradition chrétienne. Ils exigent le retrait des chapitres incriminés, voire la suppression de tout le manuel « Au fil du temps », à l’instigation des 2000 signataires de la pétition qui a été déposée devant le Grand Conseil valaisan ces jours derniers.
Sabine Girardet, coéditrice de l’ouvrage destiné aux écoliers dès la troisième année (dès 9/10 ans), rappelle que la mission des écoles publiques n’est pas de faire du catéchisme, et qu’en cela elle diffère complètement de celle des Eglises et des institutions religieuses à qui revient l'éveil de la foi. L'école doit, elle, transmettre des connaissances et la mémoire qui fonde une culture, présenter avec rigueur et sans prosélytisme ce que les gens de la Bible et d’autres traditions ont cru, et ce que juifs, chrétiens, musulmans, bouddhistes notamment croient aujourd’hui. C’est pourquoi, sur les huit chapitres que comporte le manuel, six sont consacrés à la présentation du judéo-christianisme, un à l’islam et un autre au bouddhisme.
« Parler de religion dans les écoles, ce n’est pas seulement donner des informations et des éléments culturels sur les livres sacrés, précise la jeune femme, c’est aussi ouvrir les élèves à un questionnement de nature éthique et leur donner les moyens de se forger leur propre idée. La société n’est plus monocolore, c’est pourquoi nous voulons que les enfants puissent apprendre à connaître les valeurs de l’autre, afin de cohabiter dans la paix. Par conséquent, dans ce type d’enseignement, le prosélytisme, quel qu’il soit, pour ou contre une religion, n’est pas à l’ordre du jour ! ».
Faire réfléchir, voilà l’idée qui sous-tend tout le manuel. « Ce qui nous intéresse, c’est la discussion qui peut surgir au détour d’un chapitre, par exemple au sujet de la parole dérangeante du Christ qui a suscité en son temps un certain nombre de réactions, par exemple lorsqu’il a transgressé la loi divine en guérissant une femme le jour du sabbat. Par son geste et ses paroles, Jésus a posé clairement la question : « Les hommes sont-ils au service des lois ou les lois au service des hommes ? ». Pour actualiser l’enseignement du Christ, l’équipe de rédaction, assistée d’une quinzaine de spécialistes qui ont assuré la relecture de tous les textes, a fait un lien avec ceux qui, en Suisse lors de la Seconde Guerre mondiale, nont défié le pouvoir et n’ont pas respecté la fermeture des frontières pour et ont accueillir des réfugiés au nom d’une loi humanitaire qu’ils ont considérée comme plus importante.