L’asile ecclésiastique est une décision de derniers recours

L’asile ecclésiastique est une décision de derniers recours

La Fédération des Eglises protestantes de Suisse a publié un petit guide d’aide à la décision sur la question des églises comme lieu de refuge
Plus que des conseils pratiques, ce document offre un support de réflexion.

Photo: Des manifestants devant l'église Saint-laurent à Lausanne. CC (by-nc-nd) Gustave Deghilage

Depuis le début de l’année, plusieurs situations d’asile ecclésiastique ont interpellé le public. A Lausanne, le collectif R – composé de migrants et de leur groupe de soutien – s’est installé pendant près d’une année à l’église Saint-Laurent avant d’être accueilli par la paroisse catholique du Mont-Gré, fin avril. Dans le canton de Zurich, une famille de Tchétchènes a été logée dans la paroisse réformée de Kilchberg avant d’être renvoyée dans son pays, début juin. Et encore, au mois de mars la police a arrêté huit réfugiés dans l’église Matthäus, à Bâle.

«Nous avons reçu beaucoup de demandes au sujet de l’asile ecclésiastique et de l’occupation de locaux d’église, que ce soit de la part de médias, de particuliers ou de membres et de collaborateurs de l’Eglise», explique Marina Kaempf, chargée de communication de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS). Ainsi, la FEPS a décidé de publier mi-août un document de réflexion sur la question de l’asile ecclésiastique. Destiné aux paroissiens, aux Eglises ainsi qu’à toutes les personnes intéressées par le sujet, ce texte intitulé «l’église lieu de refuge» comporte 15 propositions qui poussent à réfléchir plutôt qu’à définir une ligne de conduite précise.

Une action ouverte

La FEPS établit les conditions indispensables à l’octroi de l’asile ecclésiastique: «Les personnes accueillies sont en situation de détresse. L’action est menée ouvertement, avec un libre accès offert au public et aux autorités. Elle est menée avec l’assentiment de la paroisse.» De plus, le texte souligne que si le droit d’asile a une place importante dans la tradition religieuse, «cette ancienne pratique ecclésiale est devenue [à l’époque moderne] l’objet de réglementations du droit humanitaire et du droit international public».

Le document relève également que l’asile ecclésiastique peut être octroyé lors d’une situation de détresse concrète, «tant que l’Etat de droit démocratique accorde à chacun ses droits fondamentaux, il ne peut y avoir par ce fait même, de droit à l’asile face à l’ordre étatique». C’est une décision de derniers recours: «Accorder l’asile ecclésiastique est une décision de la dernière extrémité et non la règle», il n’y a donc pas de procédure établie.

Pas directement utile sur le terrain

«Un important travail d’appropriation serait nécessaire pour que le document de la FEPS devienne un outil pour la pratique dans notre contexte. Je ne le trouve pas vraiment utile pour les personnes sur le terrain», explique Jacqueline Lavoyer, ancienne responsable de la diaconie dans la paroisse du Joran (Eglise évangélique réformée du canton de Neuchâtel (EREN) qui entoure le centre fédéral de Perreux. «La paroisse du Joran est présente auprès des requérants, mais elle se veut également à l’écoute de la population locale pour faciliter le bon voisinage», ajoute la nouvelle responsable, depuis le 1er septembre, de la formation de base des bénévoles qui s’occupent des requérants.

Toutefois, la quatrième proposition qui définit les différentes perspectives – entre autres le droit à la résistance, l’assistance spirituelle, l’exigence inclusive et l’aide d’urgence – dans lesquelles s’inscrit la question de l’asile ecclésiastique lui paraît «la plus aidante car elle fournit un cadre pour agir dans ce domaine». Le document met aussi en évidence le fait que «les Eglises doivent rester à l’écart des querelles partisanes». «A mon avis, l’Eglise doit garder une position tierce et agir en tant que vis-à-vis critique mais loyal de l’Etat. Nous avons une autre voix à faire entendre, nous sommes là pour trouver les meilleurs moyens de vivre ensemble», souligne Jacqueline Lavoyer.