La Ville de Genève a violé la liberté religieuse

La Ville de Genève a violé la liberté religieuse

Le Réseau évangélique suisse se réjouit de la première décision du Tribunal administratif de première instance dans le différend qui oppose plusieurs de ses membres à la Ville de Genève qui a récemment changé sa pratique et s’est montrée très restrictive en matière d’autorisation de stands pour les associations religieuses. La Ville étudie la possibilité de faire recours.

Photo: CC(by-sa) George Redgrave

Interdire aux associations religieuses de tenir des stands en ville afin de prévenir l’envahissement du domaine public est «clairement disproportionné», selon le Tribunal administratif de première instance cité par un communiqué diffusé le 23 mars par le Réseau évangélique suisse.

«La Ville peut, lorsqu’elle doit protéger un intérêt public supérieur, interdire un stand confessionnel. Une telle décision, parce qu’elle touche à la liberté religieuse de l’association, doit toutefois être nécessaire et proportionnée aux buts visés. Or le tribunal a estimé que l’interdiction systématique prononcée par la Ville était clairement disproportionnée. Elle aurait pu étudier des alternatives et trouver d’autres solutions moins radicales», relaie également le réseau évangélique suisse qui se réjouit de cette décision.

Alors que jusqu’alors elle accordait des autorisations aux stands religieux, depuis l’automne 2014, la ville a refusé ces autorisations. Plusieurs communautés religieuses ont porté plainte et certaines procédures restent pendantes.

Recours possible de la ville

Cedric Waelti, responsable de la communication de la Direction du Département de l’environnement urbain et de la sécurité (DEUS) de la Ville de Genève déclare que «la Ville prend acte de la décision du Tribunal administratif tout en insistant sur le fait que la décision n’est nullement définitive. Nous étudions la situation et les possibilités d’un recours.»

Début février, Cedric Waelti, a tenu à préciser que «le Service de l’espace et de la sécurité publique souhaite éviter toute forme de prosélytisme sur le domaine public, ce qui l’a amené à refuser certaines demandes de stands. D’autres demandes de manifestations religieuses notamment en lien avec le calendrier liturgique ont été acceptées, encore récemment. Les organisations religieuses en tant que telles ne sont donc pas bannies du domaine public de la Ville, contrairement à ce qu’on a pu entendre ou lire.»

Un soutien à la décision du DEUS, qui tranche avec les propos tenus par le Conseiller administratif Rémy Pagani dans l’émission «En ligne directe» de la RTS. «Ce n’est pas parce qu’un fonctionnaire, qui au demeurant pense faire bien son travail décide d’élaguer un peu le nombre de demandes qu’il faut monter cela en épingle. La réalité c’est que la Ville de Genève a un règlement sur la liberté d’expression qui a fait l’objet d’âpres discussions au Conseil municipal et qui garantit à tout un chacun de pouvoir, sur la base d’une demande, s’exprimer dans la rue. C’est disproportionné et c’est une erreur que d’avoir refusé un certain nombre de stands à des associations religieuses, quelles qu’elles soient. Et je trouve que les associations qui défendent des idées ont raison de porter cela devant les tribunaux»

Un droit reconnu par la Convention des droits de l’Homme

Dans son rapport récemment mis en consultation par le Conseil d’Etat du Canton de Genève, le Groupe de travail sur la laïcité, chargé de proposer des mises en application de la nouvelle Constitution genevoise en ce qui concerne les relations entre communautés religieuses et Etat, rappelle que «le fait de diffuser dans l’espace public les éléments de sa foi est un acte, non seulement légitime, mais encore protégé par la Convention européenne des droits de l’Homme, il n’en demeure pas moins qu’intervenant dans ce même espace public, le harcèlement de tiers, en vue de les convaincre d’adhérer à cette foi, contrevient à l’ordre public.» Le texte du Groupe de travail poursuit: «La jurisprudence du Tribunal fédéral permet aux autorités compétentes de distinguer entre la diffusion légitime et le prosélytisme invasif. Selon cette jurisprudence, chacun a le droit d’exprimer ses convictions à un ou plusieurs tiers dans l’espace public; en revanche, si son ou ses interlocuteurs les rejettent ou refusent d’entrer en discussion, celui qui veut convaincre doit s’abstenir d’insister.»