Un espoir pour les homosexuels évangéliques

Un espoir pour les homosexuels évangéliques

Certains évangéliques américains montrent des signes d’ouverture face à l’homosexualité. Mardi 13 janvier, le sociologue Philippe Gonzalez a dépeint une société en mutation prête à remettre en cause ses positions, lors d’une conférence à Genève, organisée par C+H.

Photo: Philippe Gonzalez

«La position des évangéliques américains face à l’homosexualité a commencé à changer, mais cette nouvelle tendance n’est pas encore arrivée jusqu’en Suisse», explique le sociologue Philippe Gonzalez lors d’une conférence sur l’homosexualité dans les milieux évangéliques, mardi 13 janvier, dans les locaux de l’association Dialogai, à Genève. Alors que jusqu’à maintenant l’opposition aux pratiques homosexuelles était une des composantes des mouvements évangéliques, la situation aux Etats-Unis tend à évoluer.

Une étude du Public Religion Research Institute sur la position des Américains face au mariage pour les personnes de même sexe, publiée en février 2014, révèle des écarts générationnels importants: les jeunes évangéliques sont deux fois plus ouverts aux mariages homosexuels que ceux de la génération silencieuse (nés entre la Grande Dépression et la Seconde Guerre mondiale). Selon cette étude, 43% des jeunes évangéliques y sont favorables.

Si cette recherche montre une évolution dans l’attitude des nouvelles générations de chrétiens, des événements viennent confirmer ce changement. En juin 2013, l’association chrétienne évangélique Exodus International, dont le but était de «guérir» les homosexuels, a annoncé sa dissolution. Son président, Alan Chambers, a présenté des excuses publiques aux gays et aux lesbiennes «pour les souffrances que son organisation leur a causés». Et surtout, il a ajouté qu’il ferait désormais son possible pour qu’ils soient mieux acceptés dans ce milieu qui rassemble environ 550 millions de fidèles dans le monde, soit un quart des chrétiens.

Accepter les LGBT

En octobre 2014, l’éthicien évangélique américain David Gushee, professeur à l’Université Mercer – une institution baptiste en Géorgie – a publié Changing our mind (Changer son point de vue), un ouvrage dans lequel il reconnaît s’être trompé sur la question des lesbienne, gay, bisexuel et transsexuel (LGBT). L’auteur explique comment il a changé d’avis et pourquoi il pense désormais que les LGTB doivent faire partie des Eglises évangéliques. «La position de David Gushee était encore impensable, il y a cinq ans. Il a mis en place une théologie conservatrice sur le plan herméneutique, mais progressiste sur la question des LGTB. L’atmosphère a complètement changé», explique Philippe Gonzalez.

Une des raisons qui ont poussé l’éthicien américain à revoir sa position est le coming-out de sa jeune sœur. «On ne prend pas assez en compte l’importance et l’impact des relations de proximité, les relations interpersonnelles peuvent changer la donne, souligne le sociologue des religions. Actuellement, nous récoltons les fruits des nombreux coming-outs, cela fonctionne par capillarité».

Quid dans les communautés en Suisse?

«Je vois cette évolution avec beaucoup d’espoir», sourit Sacha Perzoff, le président de C+H, l’association Chrétien-ne et Homosexuel-le, qui a organisé la conférence à Dialogai. «La puissance économique des mouvements américains pourrait bel et bien faire avancer la situation en Europe», estime cet informaticien fraichement retraité, membre de la paroisse protestante de Plan-les-Ouates. Aux Etats-Unis, environ 30% de la population est évangélique contre 3% en Suisse.

Et bien que la tendance américaine n’ait pas encore traversé les frontières, l’Eglise évangélique de Meyrin a fait preuve d’ouverture. Eric Morel, membre de cette communauté, y a récemment fait son coming-out. «J’ai été bien accueilli, surtout par les femmes et les jeunes», raconte l’étudiant en médecine de 23 ans. Parallèlement à sa démarche, il a rédigé un essai théologique sur l’homosexualité. «Je fais partie de cette Eglise depuis trois ans. Je pense que la relation de proximité joue un rôle important, car si les évangéliques rejettent les pratiques homosexuelles, ils ont beaucoup de difficultés à rejeter une personne qu’ils connaissent», ajoute-t-il.