Jeunes évangéliques privés de subventions
Le mouvement évangélique, cette branche du protestantisme qui insiste sur la conversion individuelle et reconnaît la Bible littéralement comme la Parole de Dieu, serait-il discriminé? C’est ce que laisse penser un article de l’édition d’octobre du mensuel «Christianisme aujourd’hui» dans lequel il est dévoilé que plusieurs organisations évangéliques se sont vues refuser une aide de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), pour un montant total d’environ 500’000 francs, selon le périodique évangélique.
Ainsi, Les Groupes bibliques des écoles et universités (GBEU), la Ligue pour la lecture de la Bible, l’Armée du Salut, les groupes de danse et de chant Adonia, et la Fondation du grain de blé ont reçu un refus après avoir déposé une demande d’aide financière au titre de l’encouragement des activités extrascolaires des enfants et des jeunes. Un choc pour certaines qui bénéficiaient de ces aides depuis une dizaine d’années. D’autant plus que, selon l’enquête de «Christianisme aujourd’hui», plusieurs organisations d’arrière-fond réformé ou catholique ont quant à elles, reçu de nouveau des subventions en 2014.
«Nul ne peut se prévaloir d’un droit à ces subventions», souligne Eveline Zurbriggen, responsable du domaine compétent au sein de l’OFAS, contactée par Protestinfo. Le fait qu’une association soit aidée une année ne garantit en rien que cette aide sera perpétuée les années suivantes. «Il est tout à fait possible qu’une demande d’aide financière ait été acceptée il y a une année sur la base de la seule évaluation générale effectuée pour chaque demande», mais que cette année une évaluation complémentaire fasse apparaître que la demande «ne satisfait pas à toutes les exigences légales». Or justement, «nous avons soumis à ce type d’évaluation les aides octroyées à toutes les organisations se référant à une croyance religieuse, et ce sans prendre en considération quelque croyance que ce soit», confirme la fonctionnaire. Cette façon de procéder est, selon l’OFAS, conforme à la loi fédérale sur l’encouragement de l’enfance et de la jeunesse (LEEJ), entrée en vigueur début 2013.
Eveline Zurbriggen rappelle, en outre, que «les subventions ne constituent pas des cadeaux, car elles sont obligatoirement liées à la fourniture de certaines prestations.»
Aucune discriminationCette année, un contrôle approfondi a effectivement été appliqué à toutes les demandes émanant d’organisations religieuses sans que leur appartenance confessionnelle n’entre en ligne de compte. «Plusieurs organisations confessionnelles ont reçu des subventions en 2014; le montant total qui leur a été alloué est de plus de 600’000 francs. Autrement dit, l’OFAS ne fait preuve d’aucune discrimination ni à l’égard de certains courants religieux ni à l’encontre de l’ensemble des organisations confessionnelles en tant que telles», insiste Eveline Zurbriggen.
«Je crois que l’apport de nos organisations pour le bien de l’enfant et pour la prévention est largement sous-estimé», regrette Timo Hottinger, responsable administratif d’Adonia dans les colonnes de «Christianisme aujourd’hui». «Ce n’est pas comme si nos organisations propageaient des valeurs contraires à celles de l’Etat. Les valeurs chrétiennes sont largement représentées dans les lois suisses.» Mêmes regrets pour Colin Donaldson, secrétaire général des GBEU, toujours cité par le mensuel chrétien: «La formation et l’encouragement des jeunes à prendre des responsabilités est l’un des apports des GBEU à la jeunesse.» Insuffisant pour l’OFAS, qui dans le courrier annonçant son refus écrit: «Votre organisation a pour principales missions la pratique de la foi, l’instruction religieuse et la diffusion de vos croyances/principes de foi. Votre travail avec les enfants et les jeunes ne sert qu’à favoriser la mission principale de votre organisation.»
Enquête basée sur les statuts et rapports d’activité«Pour évaluer si les buts d’une organisation sont compatibles avec celui de la LEEJ, nous nous contentons de relever ceux que l’organisation a elle-même définis dans ses statuts et concrétisés dans ses rapports annuels et les documents qui figurent sur son site Internet», explique Eveline Zurbriggen. Plusieurs organisations ont annoncé leur volonté de faire recours.
«En résumé, j’aimerais insister sur le fait que le rejet des demandes d’aide financière n’est nullement motivé par la volonté de faire des économies, ni ne résulte d’une application plus stricte du cadre réglementaire; il découle simplement d’une application plus correcte de la législation. Une telle correction est dans l’intérêt des organisations en faveur de l’enfance et de la jeunesse qui remplissent les conditions d’octroi, car elles peuvent ainsi recevoir un soutien financier plus important», conclut Eveline Zurbriggen.