«J’ai toujours eu envie que le christianisme lutte pour la justice»

«J’ai toujours eu envie que le christianisme lutte pour la justice»

Pourquoi décide-t-on de s’engager pour l’Eglise? Protestinfo a rencontré trois collaborateurs de l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV) dont le parcours professionnel témoigne d’un incontestable appel. Rendez-vous le 7 septembre prochain pour la fête annuelle de l’EERV sur le thème de la vocation.

Par Laurence Villoz

«L’Eglise est une utopie à laquelle je crois et pour laquelle j’ai ressenti une vocation», lâche le pasteur Armin Kressman* (Photo © Institution Lavigny). «Je ne sais pas si elle vient de Dieu mais mon moteur est justement ce jeu de voilé-dévoilé qui se retrouve dans le rapport de Dieu avec son peuple, le fait qu’il n’y ait jamais de certitudes mais des signes». Chercheur avant tout, il a d’abord effectué des études en biologie suivies d’un doctorat pour se plonger ensuite dans la théologie et l’éthique.

«Le mystère de la vie est ce qui me guide et mes études m’ont permis de l’appréhender sous différents angles». Après avoir travailler comme pasteur pendant dix ans, il a rejoint, en 2003, l’aumônerie de l’Institution de Lavigny pour personnes handicapées. Dès le mois de septembre Armin Kressman, qui approche de la retraite, travaillera comme pasteur itinérant dans la paroisse du Sud-Ouest lausannois pour encore six mois.

Une quête de sens

«La profession est le lieu d’expression de la vocation», explique le théologien blogueur. Fasciné par le visage des autres, Armin Kressman évoque son travail d’aumônier à Lavigny comme un endroit idéal pour poursuivre sa quête de sens en lien avec le mystère de la vie et de Dieu. «Le monde de la normalité est pauvre en comparaison de celui du handicap qui présentent des énigmes et une plus grande richesse», ajoute ce théologien qui affirme avoir répondu à cet appel avec une certaine appréhension au départ.

«Tous les êtres humains sont créés à l’image de Dieu et le problème des personnes handicapées n’est pas leur handicap, mais la souffrance et le regard des autres». Plusieurs récits de guérison sont racontés dans la Bible, mais pourquoi Dieu voudrait-il changer quelqu’un qu’il a créé à son image, s’interroge Armin Kressman. «Je n’ai jamais vu de miracle physique mais beaucoup de miracles relationnels».

«Ma vocation est d’être pasteure»

Une autre pasteure, Aude Gelin, une jeune femme d’une trentaine d’années a, quant à elle, ressenti un véritable appel de Dieu. «La vocation est un projet entre Dieu et une personne. Dieu donne l’impulsion et la personne est disponible pour la recevoir et en faire quelque chose», explique Aude Gelin qui sera consacrée lors de la journée de l’EERV. «Ma vocation est d’être pasteure, mais il m’a fallu du temps avant de comprendre et d’être prête à répondre positivement à cet appel». La pasteure a perçu différentes balises déposées sur sa route qui l’ont ainsi guidée.

Cette jeune femme qui se destinait à suivre des études à la Haute école pédagogique, a assisté, un peu par hasard, à la présentation de la Faculté de théologie lors des portes ouvertes de l’Université de Lausanne. «La présentation m’a chamboulée et j’ai décidé d’entreprendre des études en théologie par intérêt pour les matières enseignées».

Après un voyage à Madagascar où la foi était très présente dans la vie des gens, «l’idée de devenir pasteur m’a trotté dans la tête». Mais c’est après plusieurs expériences, dont une en milieu carcéral qu’elle a choisi de sauter le pas. «Durant ce stage, j’y ai découvert le sens profond du pardon et cela m’a donné envie d’être à l’écoute des gens». Guidée par les rencontres «avec les gens là où ils sont», «le partage de l’amour de Dieu avec les familles» et «les questions de sens», cette habitante de Lignerolle se déplace en autostop. «Dans chaque rencontre, je perçois un clin d’œil de Dieu».

Un christianisme juste

Pour Hélène Küng, la directrice du Centre social protestant (CSP), la justice et l’égalité sont ses principaux moteurs. «J’ai toujours eu envie que le christianisme lutte pour la justice», explique cette femme de 56 ans. «Comment le christianisme peut-il être à la fois la religion des colonisateurs et témoigner d’une profonde soif de justice?». Poussée par un besoin de découverte et de réflexion, Hélène Küng a entrepris des études en théologie à l’Université de Lausanne. Elle est partie, ensuite, enseigner la théologie dans une école au Rwanda pendant 6 ans.

De retour en Suisse, elle s’est impliquée dans diverses activités bénévoles au sein de l’EERV tout en s’occupant de ses quatre enfants. Dans les années 2000, elle a travaillé à l’aumônerie œcuménique au centre fédéral d’Enregistrement pour requérants d’asile, à Vallorbe. Depuis six ans, elle est à la tête du CSP du canton de Vaud. «Les réponses que j’ai trouvé durant mes différentes activités n’ont jamais cessé d’engendrer de nouvelles questions», explique la directrice du Centre.

Le CSP tiendra un stand lors de la journée de l’EERV. «Le Centre répond à une double vocation contradictoire: l’égalité des traitements et soutenir les plus faibles», explique sa directrice. A la lumière de ce double appel, il informe le public de ses activités pour redonner aux personnes qui en ont besoin, «une place agissante dans la société et surtout leur permettre d’être indépendantes». Tous les collaborateurs du CSP travaillent selon ces valeurs sans pour autant être protestants.

La vocation en fête

«Nous avons décidé de créer un événement festif autour de culte de consécration», explique le pasteur et conseiller synodal Jean-Michel Sordet. Auparavant, ce culte avait lieu en novembre pendant le synode. Ainsi, pour la deuxième année consécutive, la fête de l’EERV se déroulera autour de la cathédrale de Lausanne.

Huit personnages publics témoigneront de leur vocation. Parmi eux, le professeur honoraire de théologie à l’Université de Lausanne, Daniel Marguerat, la conseillère d’Etat, Nuria Gorrite ou encore la directrice d’Amnesty international Suisse, Manon Schick. «Nous avons besoin de susciter de nouvelles vocations dans l’Eglise vaudoise», ajoute le conseiller synodal. Plusieurs ministres partiront à la retraite ces prochaines années et la relève n’a pas encore été trouvée.

Dans le quartier de la cité, une vingtaine de stands présenteront leurs activités. Parmi lesquels, l’association DM-échanges et mission, Eglise-environnement, la branche écologique de l’EERV, le tipi d’Evangile en chemin et encore un stand où les visiteurs pourront préparer le pain pour la Cène.

Une cantine proposera des mets élaborés avec des produits frais et issus de l’agriculture biologique et des activités de bricolages seront organisées pour les enfants. Une dizaine de groupes de musique ainsi que plusieurs spectacles animeront la manifestation.

Liens: La journée de l’EERV