Les cloches de Fribourg et Paris prêtes à sonner à toute volée

Les cloches de Fribourg et Paris prêtes à sonner à toute volée

Elles s’appellent Clémence, Marie ou encore Anne-Geneviève. Les cloches des cathédrales Notre-Dame de Paris et Saint-Nicolas de Fribourg, viennent de retrouver leur place. Prêtes à sonner pour Pâques.
(Photo: Le grand bourdon “Emmanuel” de la cathédrale de Paris. © NDP)

«La qualité d’une belle sonnerie ne dépend pas uniquement de sa justesse», explique le campanologue et historien de l’art, Matthias Walter. Chaque cloche émet un son qui correspond à une note principale*. Pour Pâques, les cloches sonnent à la volée, c’est-à-dire toutes en même temps. «Il y a des cloches qui ne s’harmonisent pas parfaitement, de manière mathématique, mais ce n’est pas gênant», ajoute le spécialiste.

Dans les cathédrales de Fribourg et de Paris, les cloches ont dû être décrochées car «elles sonnaient faux». «Si les cloches ne sont pas harmonisées, c’est souvent car le mécanisme fonctionne mal», relève le campanologue. En effet, les travaux effectués dans la Cathédrale de Fribourg ont consisté à changer les battants et la structure de soutien. Vielles d’environ cinq siècles, les treize cloches méritaient un sérieux coup de jeune. «Ces cloches ont une grande valeur historique, il était important de leur redonner leur son original», sourit Matthias Walter.

Neufs nouvelles cloches à la cathédrale de Paris

En revanche, la cathédrale Notre-Dame de Paris s’est vue offrir neuf cloches flambant neuves. Seul le grand bourdon, Emmanuel, a été conservé. Cinq d’entre elles ont été ajoutées pour rétablir le nombre initial, antérieur à la Révolution française. Mais quatre autres, datant de 1856, ont été changées. «Ces cloches n’avaient effectivement pas leur place parmi les chef-d’œuvres campanaires mais je suis surpris qu’on ait pu les qualifier de qualitativement médiocres».

Selon le spécialiste, si ces quatre cloches n’offraient pas un «beau son», c’est parce qu'«elles n’arrivaient pas à s’exprimer, à cause de leur position dans le beffroi et de leur équipement technique». «J’espère qu’elles continueront à sonner dans un autre clocher», souhaite l’historien de l’art. Les quatre «vielles dames» devaient initialement être refondues, mais cette décision a provoqué la consternation. Le dossier est devant la justice et ce patrimoine historique pourrait être récupéré par l’Institut religieux Sainte-Croix de Riaumont dans le Pas-de-Calais.

Echange de cloches à Lausanne

Il arrive que les cloches changent de clocher. A Lausanne, à la fin du 19ème siècle, la cathédrale et l’église Saint-François se sont échangées une cloche pour des questions de tonalité. Certaines cloches peuvent aussi interagir d’un clocher à l’autre. Dans les années 50, l’église Notre-Dame du Valentin a reçu l’autorisation de suspendre des cloches, interdites pour une église catholique dans le canton de Vaud réformé. Les fréquences sonores émises par ces dernières ont fissuré une des cloches de la cathédrale.

En plus de voyager, les cloches ont systématiquement un nom. «La plupart du temps, le nom est donné en l'honneur d’une personne», explique le campanologue. Les cloches des églises catholiques ont souvent des noms de Saintes ou de Saints, comme Denis à Notre-Dame de Paris, en l’honneur du premier évêque de la capitale, Saint-Denis.

Les cloches peuvent aussi recevoir le nom de leur donateur, féminisé. «Par exemple si le donateur s’appelle Charles, la cloche sera baptisée Charlotte», illustre Matthias Walter. Certaines ont un «nom de fonction». A la cathédrale de Lausanne, la cloche nommée «Couvre-feu» sonnait, jadis le soir, pour avertir les citoyens qu’il était l’heure d’aller dormir. Cette cloche est toujours en place, mais n'est plus utilisée pour sonner le couvre-feu

Actuellement, il n’existe plus qu’une fonderie de cloches d’église en Suisse, la fonderie Rüetschi à Aarau. La Suisse romande possèdent des cloches célèbres pour leur histoire, leur son ou leur poids, coulées principalement en Suisse et en France. La plus grande cloche de Suisse romande sonne au beffroi de la cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg. Selon le spécialiste, les cloches de la cathédrale de Lausanne, du temple de Vevey, de la cathédrale Saint-Pierre à Genève, du temple de Moudon ou encore de l’Abbaye de Saint-Maurice valent le détour.

*On peut mesurer plus de vingt notes produites par une cloche, précise Matthias Walter. Il y a pourtant une note principale, même si elle disparaît quelques secondes après le coup du battant. Cette note est accompagnée de cinq à sept autres notes qui, elles, sont audibles longtemps.

Depuis quand sonnent les cloches?

L’origine de la sonnerie des cloches remonte au 6ème siècle environ, en Italie. Les églises avaient besoin d’un signal pour annoncer à la communauté les services divins. Ce n’est qu’au 12ème siècle que les cloches ont commencé à être nommées, d’abord par des noms de fonctions puis par des patronymes.

On entend parfois l’expression: «les cloches reviennent pour Pâques». Mais où sont-elles parties? Vers le 7ème siècle, l’Eglise a décidé d’interdire de sonner les cloches entre le jeudi Saint et le dimanche de Pâques, en signe de deuil pour la mort du Christ.

Une légende catholique affirme que les cloches partent à Rome pour se faire bénir par le Pape. Elles reviennent en chantant le dimanche de Pâques pour annoncer la résurrection du Christ.

Source: Dictionnaire encyclopédique du Moyen-Age, vol.1