"36 chandelles": les histoires décalées et solidaires de Sabine Dormond et Hélène Küng pour le temps de Noël

"36 chandelles": les histoires décalées et solidaires de Sabine Dormond et Hélène Küng pour le temps de Noël

La détresse ordinaire des demandeurs d’asile, elles la connaissent de façon presque intime, pour l’avoir côtoyée dans leur travail quotidien, pour avoir retroussé leurs manches pour la soulager: la Montreusienne Sabine Dormond, traductrice pour Caritas, conteuse et conseillère communale socialiste, et la pasteure lausannoise Hélène Küng, qui dirige le Centre Social protestant vaudois (CSP), ont uni leur sensibilité, leurs talents et leur révolte contre le durcissement du nouveau droit d’asile dans un petit livre décalé, écrit à quatre mains, « 36 chandelles »
Le bénéfice de la vente du livre sera versé au Service d’Aide Juridique aux Exilé-e-s (SAJE) qui accueille et assure l’accompagnement juridique des réfugiés. La couverture du livre est vert pomme, comme un petit fruit acide qui fait faire la grimace. Des dessins rigolos émaillent le bouquin, dus à l’illustrateur Tassilo Jüdt. Les histoires, elles, sont douces amères, souvent décalées. Elles parlent d’instants de vie, donnent des fragments de la vérité des autres, de ceux auxquels on prête souvent si peu d’attention. Elles offrent un regard sur l’exil, croquent des instants de vie avec tendresse et humour, font défiler tout un cortège de gens ordinaires en prise avec la vie. Parmi eux, une tête de Turc, un certain Tristophe Bloqué, tétanisé par le cauchemar qu’il vient de faire, dans lequel il se retrouve noir comme l’ébène, noir comme l’un de ces exilés sans papiers auquel il fait consciencieusement la chasse. Sabine Dormont, à qui l’on doit la nouvelle, s’est vengée de la défaite qu’elle a connue lors de l’acceptation par le peuple de la nouvelle loi sur les étrangers et sur la révision du droit d’asile. On rencontre même un petit bonhomme confiant qui sait que Dieu est dans son cœur, à portée de main en cas de besoin. Mais qui ne retrouve plus le mode d’emploi, quand justement il ressent l’urgent besoin faire appel à lui.

Chaque nouvelle est signée d’une minuscule initiale dans une pastille verte, difficilement repérable. Au lecteur de s’amuser à deviner qui a écrit quoi. Au compteur, c’est la conteuse Sabine Dormond qui aligne le plus grand nombre de nouvelles, et c’est Hélène Küng la championne des histoires courtes, pas plus longues qu’un soupir. Certaines des nouvelles sont quasiment kafkaïennes, dépeignant un individu broyé par la société.« Nous avons voulu partager du courage et des manières de voir », explique Hélène Küng, de sa voix gaie d’irréductible enthousiaste.