«C’est une grave erreur de restreindre les religions aux domaines du privé»

«C’est une grave erreur de restreindre les religions aux domaines du privé»

Quelle est la sphère d’intervention des autorités religieuses? Quatre responsables, protestant, catholique, juif et musulman en ont débattu au Salon du Livre, à Genève

Photo: De gauche à droite: Marc Berrebi, membre du comité de la CICAD et modérateur du débat, Nicolas Blanc, Sandrine Ruiz, Emmanuel Fuchs, Eliezer Shai Di Martino

«Il est très important que les autorités catholiques puissent prendre position sur des questions politiques et sociétales», affirme Nicolas Blanc, responsable catholique des Services de la formation de l’aumônerie de l’Université de Neuchâtel. Invités jeudi 26 avril sur le stand de la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (CICAD) au Salon du livre, quatre responsables religieux se sont penchés sur leur rôle dans la société actuelle. Est-ce que leur travail se limite uniquement au religieux ou s’étend-il également à des questions politiques, sociétales et morales?

«Le fait que l’Église puisse prendre position permet de lutter contre le laïcisme qui ne donne plus la parole au religieux et le fondamentalisme qui engendre le repli de la communauté sur elle-même», ajoute Nicolas Blanc. «Les communautés religieuses doivent s’intéresser au politique en tant que citoyen. Il n’y a pas une parole pour l’ensemble du protestantisme, mais notre Église doit penser à ces questions et permettre les débats. C’est une grave erreur de restreindre les religions aux domaines du privé», insiste Emmanuel Fuchs, président de l’Église protestante de Genève. Même son de cloche du côté d’Eliezer Shai Di Martino, le rabbin de la Communauté israélite de Lausanne et du canton de Vaud: «La religion a quelque chose à dire à la société».

Sandrine Ruiz, présidente de l’Union vaudoise des associations musulmane (UVAM), rejoint également la position de ses trois préopinants, soulignant toutefois qu’elle n’est pas responsable religieuse au même titre qu’un imam. «Dans ma fédération, il s’agit justement de faire autre chose que du religieux, pour éviter le repli identitaire. Lorsqu’il y a des votations, par exemple, nous invitons des personnes politiques de tout bord pour en débattre».

Alors que les quatre invités sont unanimes sur le rôle politique des religions, ils soulignent également l’importance de l’interprétation des textes pour éviter toute dérive. «L’interprétation est fondamentale, on ne peut lire actuellement un texte de l’Ancien Testament comme au 18e siècle, c’est une parole vivante», souligne Emmanuel Fuchs. Nicolas Blanc relève toutefois le rôle des autorités religieuses dans l’interprétation. «Chez les catholiques, elles doivent conserver et transmettre le sens du message».