Josiane Javet-Frossard: une diacre tout-terrain

Josiane Javet-Frossard: une diacre tout-terrain

Après la blouse blanche de l’infirmière, la veste de la police et la tenue sobre de la catéchète, Josiane Javet-Frossard enfile la robe de diacre. On pourrait croire qu’elle aime changer d’uniforme, mais son parcours suit le fil rouge d’une véritable vocation.

Photo: Josiane Javet-Frossard devant l’entrée du Temple d’Estavayer-le-Lac

Une coupe à la garçonne, un blouson surmonté d’un gilet et un sourire franc: Josiane Javet-Frossard se distingue par son allure sportive. Portant deux chaises tout en tirant une table, elle improvise un lieu de rendez-vous dans la salle de musique de la maison de paroisse d’Estavayer-le-Lac (FR). Depuis le mois de septembre, cette mère de famille de 45 ans a rejoint le ministère diaconal. Responsable, entre autres, du dicastère de l’enfance dans la paroisse d’Estavayer-le-Lac de l’Eglise évangélique réformée du canton de Fribourg, elle jongle entre les différents groupes de l’école du dimanche.

Mais avant d’enfiler la robe ministérielle, Josiane Javet-Frossard a revêtu plusieurs uniformes. Déjà guidée par son envie d’aider autrui, cette originaire du Doubs, en France, vient étudier à l’école d’infirmière-assistante de La Chaux-de-Fonds, à l’âge de 18 ans. «Enfant, je rêvais d’être vétérinaire, je ramenais à la ferme de mes parents tous les animaux blessés que je trouvais, des souris, des oiseaux et même des couleuvres». Issue d’une famille catholique, l’adolescente qui avait renié l’existence de Dieu renoue avec la religion alors qu’elle est stagiaire dans un service d’oncologie. «La moitié du personnel médical était chrétien et nous commencions la journée par prier pour les patients».

Ainsi, la jeune infirmière-assistante rejoint une Eglise évangélique – qui pratique une lecture littérale de la Bible –, dans les années 1990. «A cette époque, j’avais envie de convertir tout le monde». Mais au même moment, elle se fait licencier de l’Etablissement médico-social dans lequel elle travaille pour y avoir dénoncé, selon elle, un cas de maltraitance. «Dégoûtée du milieu médical, j’ai décidé de changer complètement de domaine», raconte-t-elle.

La veste bleue d’une policière

Le virage est radical. Cette «casse-cou» – elle adore la vitesse et les motos – commence l’école de police au Chanet (NE). Portant la veste bleue des agents de police, elle assure la sécurité en ville de Neuchâtel, une autre façon d’être là pour ceux qui en ont besoin. A cette période, Josiane Frossard rencontre Jean-François Javet, son futur conjoint. Après leur mariage, elle le rejoint à Winterthur où ils vivent une année, pendant laquelle la jeune femme met son activité professionnelle entre parenthèses et en profite pour apprendre l’allemand.

A leur retour en Suisse romande, les jeunes mariés s’installent dans la Broye et rejoignent la paroisse d’Estavayer-le-Lac où Josiane Javet-Frossard commence à enseigner le catéchisme tout en élevant ses deux enfants, Sébastien et Othilie. Et alors qu’ils ont moins besoin de leur mère, elle s’inscrit au séminaire de culture théologique à la Maison des Cèdres, à Lausanne. «Cette formation a complètement bousculé ma foi», explique la diacre qui a failli devenir «athée».

Crise de foi

Déboussolée, Josiane Javet-Frossard reconsidère les principes qui lui ont été inculqués pendant son enfance et dans l’Eglise Evangélique. «Sur quoi baser sa foi, lorsqu’on apprend qu’Abraham et Moïse n’ont probablement pas existé? J’ai eu l’impression d’avoir été menée en bateau pendant des années». Après le raz-de-marée provoqué par une lecture analytique des textes bibliques, elle surmonte cette crise existentielle en reconstruisant, sa foi qu’elle fonde alors sur son expérience. «J’ai découvert que le plus important était le message transmis par le texte et non la véracité de l’existence des personnages».

Ainsi, cette battante poursuit sa vocation spirituelle en réalisant une formation diaconale. «A ce moment-là, Josiane avait tendance à douter de ses capacités, mais je l’ai encouragée», relève toutefois, le pasteur Frédéric Siegenthaler. «Au début de mon stage diaconal, je ne pensais pas travailler en paroisse, mais mes expériences m’ont fait changer d’avis et c’est avec conviction que j’ai postulé à Estavayer-le-Lac», sourit Josiane Javet-Frossard qui se verrait bien revêtir l’habit vert des aumônières militaires.

Si Josiane Javet-Frossard manque parfois de confiance en elle, cette habitante de Montbrelloz (FR) ne craint pas de questionner l’existence. Elle creuse les problématiques qui l’interpellent, se remet en question et ajuste sa vision du monde en fonction de ses découvertes. Alors qu’elle était formellement opposée au suicide assisté – «en tant qu’infirmière-assistante, j’ai toujours souhaité qu’on développe les soins palliatifs» – elle mène des recherches sur cette pratique, se l’approprie, la confronte à sa foi. «Finalement, j’ai réalisé que j’étais prête, en tant que diacre, à accompagner une personne, suivie préalablement, qui aurait recours à Exit».

«J’ai toujours été habitée par la volonté d’aider et de prendre soin des autres, mais en tant qu’infirmière-assistante ou agente de police, si je parlais de ma foi, on me disait «Tais-toi». Maintenant que je suis diacre, je peux enfin le faire dans mon travail». Ainsi, la femme aux uniformes, qui sera probablement consacrée en 2015, a trouvé la profession qui lui permet d’être là pour les autres tout en portant l’Evangile.

Bio Express

  • 1969: Naissance le 19 février à Montancy, en France
  • 1987: Ecole d’infirmière-assistante à La Chaux de Fonds
  • 1990: Ecole de police à Neuchâtel
  • 1992: Rencontre de Jean-François Javet, son futur mari
  • 1996: Naissance de son fils Sébastien
  • 1999: Naissance de sa fille Othilie
  • 2005: Séminaire de culture théologique à la Maison des Cèdres, à Lausanne (2 ans)
  • 2011: Formation diaconale à l’Office protestant de formation (OPF), à Neuchâtel (3 ans)