Un oui de raison pour la loi sur l’asile, selon la FEPS et l’EPER

Un oui de raison pour la loi sur l’asile, selon la FEPS et l’EPER

La Fédération des Eglises protestantes de Suisse et l’entraide protestante suisse recommandent de voter oui à la loi sur l’asile, qui sera soumise au peuple le 5 juin prochain
En automne dernier, l’Union démocratique du centre avait lancé un référendum contre cette loi, qui a été déposé en janvier 2016.

Photo: CC (by-sa) Global Panorama

«Parfois, un requérant d’asile doit attendre trois ans pour savoir si sa demande est acceptée ou non. Durant cette période d’attente, il n’a pas accès aux mesures d’aide à l’intégration, comme les cours de langues», explique Marina Kaempf, chargée de communication à la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS). La mise en place de procédures rapides est justement l’un des objectifs de la loi sur l’asile, qui sera votée dimanche 5 juin prochain. Le temps de traitement des dossiers passerait donc de maximum trois ans à 140 jours (3 mois et demi).

Assistance juridique

Il est impossible pour la Confédération d’accélérer les procédures d’asile sans aucune représentation juridique. «Cette représentation est un garde-fou», déclare Marina Kaempf. «Il faut éviter que l’accélération des procédures prévues dans la loi ne se fasse au détriment de la justice des décisions. Cet outil garantit une protection des droits des demandeurs d’asile», poursuit-elle. Philippe Bovey, secrétaire romand de l’entraide protestante suisse (EPER), précise que «l’assistance juridique, présentée comme un plus dans le débat, est en fait une obligation centrale d’un État de droit, déjà respectée dans d’autres domaines, par exemple pénal». Il souligne aussi le risque d’une représentation centrée sur l’accélération des procédures: «présentée comme une mesure d’accompagnement, l’assistance juridique prévue dans la loi risque de se résumer à un ‘contrôle de qualité’ formel. Pour nous, le cœur de cette assistance doit pourtant rester la protection des droits fondamentaux des requérants».

Bien que ce soit une obligation légale, le système juridique pour les requérants est actuellement mis en place par les Eglises et des ONG. Il est également entièrement soutenu par elles. «Dans le canton de Vaud, le Service d'aide juridique aux exilé-e-s (SAJE) est financé pour plus de la moitié par l’EPER, le reste par différents acteurs de la société civile, depuis Caritas Vaud ou le CSP Vaud jusqu’à l’Église protestante vaudoise, l’association SOS-Asile ou l’ARAVOH (Association auprès des requérants d'asile de Vallorbe œcuménique et humanitaire)», explique Philippe Bovey.

Si la nouvelle loi sur l’asile est acceptée par le peuple, l’Etat affirme qu’il financera ces assistances juridiques. Et c’est notamment sur la question «des avocats gratuits» que le comité référendaire a basé sa campagne. Pour eux, le fait que des requérants puissent bénéficier d’avocats, payés par l’Etat, aurait pour conséquence «une avalanche de recours et une hausse des coûts de l’asile», peut-on lire dans le livret rouge distribué lors de cette votation. Des arguments que Philippe Bovey réfute: «l’exemple de Zurich, qui teste depuis deux ans ce nouveau système, montre au contraire une baisse des recours». «De plus, beaucoup de requérants d’asile n’aura pas droit à cette assistance juridique, en particulier le 40% de cas complexes qui passeront en procédure étendue dans les cantons», précise-t-il. Ainsi, «un bureau de conseil juridique comme le SAJE gardera sa raison d’exister à l’avenir».

Des humains avant des chiffres

«Pour une ONG, la question principale est de savoir s’il y a une amélioration de la qualité des décisions prises», explique Philippe Bovey. «La procédure doit être juste. Si elle ne l’est pas, le requérant doit pouvoir faire recours, comme n’importe quel autre justiciable», poursuit-il. Et «il faut garder à l’esprit que l’asile est un droit pour des personnes qui son en danger, qui ont besoin d’aide» explique Marina Kaempf. «Il ne s’agit pas d’un fardeau, de chiffres et de coûts», ajoute-elle.

Et même si pour la FEPS cette loi permet une procédure équitable et respecte les droits des demandeurs, «elle regrette par contre la suppression des demandes d’asile dans les ambassades», informe Marina Kaempf. Du côté de l’EPER, «nous recommandons le oui, par pragmatisme», résume Philippe Bovey.

Un référendum qui réunit malgré eux des milieux totalement antinomiques

Que l’Union démocratique du centre (UDC) soit opposée à la loi sur l’asile n’a probablement étonné personne. Il n’est cependant pas le seul à se dresser contre cette dernière. Le parti d’extrême gauche, SolidaritéS, ainsi que certaines associations proches des migrants, comme le collectif R, qui a occupé plus d’un an l’église de Saint-Laurent à Lausanne, recommandent également de voter «non» le dimanche 5 juin prochain.

L’avocat Christophe Tafelmacher, coresponsable de SOS Asile Vaud et qui a également travaillé comme juriste au sein du SAJE dénonce un retour en arrière «avec un texte qui contient toutes les mesures contestées en 2012-2013. A ceci s’ajoutent les nouvelles dispositions concentrant la procédure dans des centres fédéraux, avec une série de restrictions à peine compensées par une aide juridique extrêmement limitée». Pour Solidarités sans frontières, «l’accélération des procédures ne peut se faire au détriment des droits des requérant-e-s d’asile. La centralisation quant à elle renforcera l’isolement physique et l’encasernement des requérant-e-s d’asile dans de grands centres loin du reste de la population.»

Même si les milieux proches des migrants et l’extrême gauche sont contre la loi sur l’asile, ils n’hésitent pas à afficher leurs désaccords aux arguments de l’UDC, qui s’oppose également à cette loi.