Des images pour nous pousser à agir contre l’injustice

Des images pour nous pousser à agir contre l’injustice

Protestinfo propose régulièrement des éditos rédigés par des membres des rédactions de Médias-pro.

Giflé par une exposition de dessins, Joël Burri, responsable de Protestinfo, souhaite que touchés par de telles images, nos cœurs continuent à pousser nos raisons à se révolter contre le drame de la migration.

Image: Francesco Piobbichi/Mediterranean hope

Tout le monde se souvient d’Aylan Kurdi, 3 ans. En septembre, le cliché montrant son petit cadavre rejeté par la mer, le visage contre le sable d’une plage grecque a bouleversé l’opinion publique. Pour quelques jours, le sort des migrants prêts à risquer leur vie pour rejoindre l’Europe a fait la une de l’actualité.

Six mois plus tard, l’émotion est retombée. Le «dossier des migrants» fait l’objet d’accords financiers entre pays. La gestion du problème a un prix. La défense des droits de l’homme semble bien secondaire. Chaque semaine ou presque, on apprend dans l’indifférence tantôt que des migrants ont échappé de peu à la mort, tantôt qu’ils n’ont pas été secourus à temps.

Invité à participer à un colloque de la Conférence des Eglise protestantes des pays latins d’Europe, je me suis rendu en Italie la semaine passée. «La communication religieuse dans les médias, une affaire de cœur ou de raison?», telle est l’interrogation qui nous a occupé durant deux jours.

Mais cette escapade dans le Piémont a aussi été l’occasion de découvrir quelques une des nombreuses actions auxquelles participent les protestants italiens en faveur des migrants. Par exemple, un important travail juridique autour des accords de Schengen/Dublin a permis à la fédération des Eglises protestantes d’Italie, au vaudois du Piémont et à la communauté Sant'Egidio de signer un protocole avec les ministères des Affaires étrangères et de l’Intérieur pour mettre en place un «corridor humanitaire». Fin février, un premier vol a permis à des Syriens réfugiés au Liban d’atteindre Rome en avion, évitant ainsi de financer le crime organisé au travers de passeurs.

L’un des moments forts du séjour a été pour moi la découverte d’une exposition de dessins. Basé sur l’île de Lampedusa, leur auteur Francesco Piobbico raconte par l’image l’histoire de ces migrants. Il rend hommage, il crie à l’injustice.

Beaucoup de médias ont refusé de publier le cliché d’Aylan, le trouvant trop choquant, ou irrespectueux pour ce petit être parti trop tôt. Mais le malaise est presque aussi grand face au dessin de Francesco Piobbico. Une gifle qui nous rappelle notre indifférence.

Les chiffres et les récits se suivent et ils ne nous émeuvent pas sur la tragédie qui se déroule en Méditerranée. Ils s’adressent à notre raison, mais notre cœur résiste. L’image, elle, touche à notre cœur… et quand les émotions nous poussent à faire marcher notre raison, ce sont des solutions aussi belles que les corridors humanitaires qui voient le jour.