Dieu se passera des Eglises qui mettront la clé sous la porte

Dieu se passera des Eglises qui mettront la clé sous la porte

L’écrivain Tom Ehrich, prêtre de l’Eglise Episcopale des Etats-Unis, dénonce le contre-témoignage des Eglises qui se préoccupent surtout d’elles-mêmes, au lieu de mettre en pratique l’amour du prochain.

Photo: Eglise Saint Thomas More à New York © US Today, Robert Deutsch

(RNS-Protestinter)

Soyons clairs: le fameux «déclin du christianisme en Amérique» dont tout le monde parle n’a rien à voir avec un Dieu qui aurait perdu la foi en l’humanité. Dieu n’a rien à voir avec le fait de perdre ou non notre boussole morale à cause de tout ce qui arrive d’odieux. Il n’a rien à voir avec une éventuelle inconstance de la jeune génération. Il n’a rien à voir non plus avec une tension entre mode et tradition. En fait, je dirais que le christianisme n’est pas en difficulté du tout.

Ce sont les églises qui sont en difficulté. Ce sont les différentes confessions qui sont en difficulté. Ce sont les institutions religieuses, comme les écoles de théologie, qui sont en difficulté. Ce sont les «professionnels» du religieux et leurs dirigeants qui sont en difficulté. Mais les églises ne peuvent pas retenir Dieu en otage. Dieu fera ce que Dieu fera. Que nos églises restent ouvertes ou pas, Dieu continuera d’aimer ce qu’il a créé. Ce n’est pas la perte d'une institution qui le dissuadera de quoi que ce soit.

Donc, détendons-nous au sujet du christianisme qui serait en voie de disparition. Ce n’est pas une crise existentielle qui concerne Dieu ou la foi en Dieu. Même si toutes les églises des Etats-Unis disparaissaient, Dieu trouverait un autre chemin. La tragédie – au sens classique des blessures auto-infligées et des faiblesses fatales - se trouve dans le fait que nous sommes responsables de ce qui arrive, et que nous avons blessé beaucoup de gens au cours du chemin. Voilà cinq erreurs que nous avons commises.

Nous avons arrêté d’essayer

Pendant un certain temps, les institutions religieuses aux Etats-Unis on pris des risques audacieux. Puis, nous nous sommes installés en mode de maintenance, parce qu’on se sentait confortable et bien à l’abri. Nous nous sommes battus pour des histoires de grenouilles de bénitier qui ne comptent pas, parce que les choses qui importent vraiment comme le racisme, l'inégalité, la démagogie, le crime organisé, l’obsession du sexe et de l’argent, nous touchaient de beaucoup trop près.

Nous nous sommes arrêtés de donner

Au cours des 50 dernières années, les dons ont chuté de plus de moitié en pourcentage du revenu familial. Nous avons coupé les vivres de nos églises. Lorsque des choix budgétaires difficiles ont dû être faits, les équipements que nous convoitions ont pris le pas de manière assez générale sur la mission voulue par Dieu.

Nous nous sommes repliés sur nous-mêmes

De la même manière que les maisons américaines ont troqué leur hall d’entrée contre des patios, nous avons arrêté d’entretenir des liens avec nos voisins. Nous nous sommes arrêtés de nous tourner vers l'extérieur, sauf pour des actions de charité occasionnelles, noblesse oblige. Nous avons ouvert nos portes le dimanche pour nous accueillir les uns les autres, rien qu’entre nous.

Nous sommes devenus des obsédés du dimanche matin

Longtemps après que le dimanche a changé de caractère dans la vie américaine, nous avons continué d’attendre le culte du dimanche pour faire notre travail. Plutôt que de transformer des vies à travers le travail de mission, des cercles de développement et de spiritualité personnelle, nous avons fait assoir des gens sur des bancs pour une heure bien remplie, et avons chanté, prié, annoncé, bavardé et communié. Ensuite, nous avons renvoyé ces gens dans leurs voitures, en pensant que nous avions fait notre travail pour la semaine.

Nous avons saccagé notre réputation

Nous avons progressivement gagné une réputation de moralisateurs, râleurs, égocentriques, suffisants, ennuyeux et vieux. Aussi loin que les gens de l’extérieur peuvent s’en souvenir, nous avons passé notre temps à nous battre, avec toutefois une très haute opinion de nous-mêmes, tout en faisant des leçons de morale. Qui a besoin de cela?

Quel est donc l'avenir?

L'avenir pour Dieu est aussi prometteur et glorieux que jamais. Notre Dieu en constante évolution, toujours dynamique, toujours aimant et toujours prompt à transformer ira très bien. Nous pouvons dire nos prières avec confiance. Les Eglises, par contre, sont en difficulté. Beaucoup d’entre elles manquent d'argent. Beaucoup perdront pied.

Et pourtant, certaines vont relever le défi, elles vont abandonner de vieilles certitudes et faire ce que Jésus a fait. Elles vont se tourner vers le monde, annoncer la bonne nouvelle, accueillir les étrangers, servir les «plus petits d’entre eux», offrir leur vie et leurs ressources, travailler pour la justice et la charité, être des communautés de foi sept jours sur sept, et faire passer l’amour du prochain avant les principes et la gentillesse avant tout. Et Dieu sera au milieu d'eux.