Une star de YouTube fait de la prévention contre le terrorisme

Une star de YouTube fait de la prévention contre le terrorisme

Pour lutter contre la radicalisation des jeunes, les autorités anglaises ont fait appel à Humza Arshad, un comédien musulman qui cartonne sur Internet. Désormais, il sillonne l’Angleterre pour faire de la prévention dans les écoles.

Photo: Humza Arshad © Timeless Media/USA Today/RNS

(USA Today/RNS/Protestinter)

Humza Arshad est populaire. Ses sketches humoristiques intitulés «Le journal d’un mauvais garçon» (Diary of a Bad man) ont attiré plus de 60 millions de vues. Diffusées depuis cinq ans sur Internet, ses vidéos lui ont apporté la gloire. Dès lors, quand la police britannique cherche des moyens alternatifs pour atteindre les jeunes afin de la prévenir des dangers de la radicalisation, elle sait qui contacter.

Humza Arshad, âgé de 29 ans, a d’abord été recruté par la police de l’East Midlands, dans le centre de l’Angleterre, pour prévenir les jeunes de la radicalisation en organisant des ateliers dans les écoles de la région. Scoltland Yard, le quartier général de la police londonienne, a été tellement impressionné par cette initiative, qu’il a invité, ce printemps, le comédien britannique à donner des conférences anti-extrémisme à des jeunes de 11 à 18 ans, dans plus de 30 établissements scolaires de Londres.

Les ateliers consistent en une vidéo de 15 minutes, où Humza Arshad joue le rôle d’un jeune dont le cousin tombe sous l’influence des extrémistes, avant de prendre conscience de son erreur et de revenir dans le droit chemin. Puis, l’acteur, les jeunes et la police débattent ensemble. Cette initiative britannique prend forme trois mois après les attentats à Charlie Hebdo.

Des étudiants ravis

La première fois que Humza Arshad est entré dans l’école Ayesha – une école musulmane pour fille dans le nord de Londres –, les étudiantes n’en ont pas cru leurs yeux. Beaucoup d’entre elles avaient entendu parler de lui et regardaient ses exploits sur YouTube.

«Je pense que les médias ont donné une image des musulmans et de l’islam très négative», a expliqué Humza Arshad aux écolières. «En même temps, il y a quelques individus malavisés qui nous donne mauvaise réputation». Il ajoute que ce genre de personnes peut se retrouver dans n’importe quelle religion ou tout autre groupe.

L’humoriste reçoit «beaucoup de retours positifs» sur Twitter et Instagram. «Je leur donne des conseils comme un grand frère», explique-t-il. «Nous le faisons avec plaisir, nous ne rendons pas les ateliers trop moralisateurs. Si les jeunes sont préoccupés, ils peuvent nous en parler». Il ajoute que la réaction des jeunes a été bien meilleure que ce à quoi ils s’attendaient.

Des écolières de la Unity Girls High School, qui se trouve juste à côté de l’école Asheya, ont également assisté aux ateliers. Sara Taitt, âgée de 15 ans, a souligné que le message transmis par Humza Arshad pouvait aider des jeunes un peu perdus, car ils pouvaient s’identifier à lui. «Même s’il fait quelques plaisanteries, il peut aussi être sérieux», ajoute Yusra Omar, âgé de 16 ans.

Trois adolescentes ont rejoint le groupe Etat islamique

Les deux jeunes filles ont parlé de leur choc, lorsqu’elles ont appris que trois filles musulmanes de la Bethnal Green Academy, dans l’est de Londres, avaient quitté leur famille pour rejoindre le groupe Etat islamique en Syrie, au mois de février. Shamima Begum (15 ans), Kadiza Sultana (16 ans) et Amira Abase (15 ans) sont soupçonnées d’avoir rejoint le pays déchiré par la guerre après avoir pris un vol entre Londres, et Istanbul. Les autorités pensent que des contacts avec des djihadistes sur les réseaux sociaux pourraient avoir joué un rôle dans leur décision de rejoindre le groupe Etat islamique.

«Nous étions toutes choquées et perturbées», explique Sara. «Nous étions aussi très tristes. L’école a organisé des réunions pour expliquer en quoi c’est dangereux». «Elles étaient vulnérables. Et elles manquaient de connaissances», ajoute Yusra.

Aucun signe avant-coureur

Humza Arshad connaissait le frère d’une des filles qui est partie en Syrie. «Aucun de nous ne l’a vu venir», explique-t-il aux étudiants. «La famille est détruite maintenant. Nous faisons de notre mieux pour que cela ne se reproduise plus».

Le Comité des affaires intérieures a publié un rapport, fin mars, dans lequel il soulignait le besoin d’une grande amélioration dans la communication entre la police, les écoles et les parents pour empêcher les terroristes internationaux de s’en prendre aux jeunes britanniques. Le rapport mentionnait également que la police devait s’engager dans un dialogue «régulier et ouvert» avec les écoles et les groupes communautaires afin d’échanger des informations pour prévenir la radicalisation.

La participation d’Humza Arshad dans la prévention auprès des jeunes est l’idée de Rizwaan Chothia de l’Unité des opérations spéciales de la police de l’East Midlands, qui a vu un jour son fils regarder «Le journal d’un mauvais garçon». Il a remarqué le succès du comédien et a eu cette idée. Il a ainsi soumis une proposition aux autorités pour engager Humza Arshad à les aider à prévenir les jeunes des dangers de la radicalisation.

Selon Rizwaan Chothia, il est difficile d’évaluer l’efficacité de l’initiative, mais la vidéo qui est montrée dans les ateliers a reçu plus de 180'000 vues sur YouTube, plus de 7000 clicks sur le pouce levé et inspiré de nombreux commentaires positifs. «Le but n’est pas de déradicaliser la population. Il suffit de planter les graines».