Religion et terrorisme ne sont pas synonymes

Religion et terrorisme ne sont pas synonymes

Chaque semaine Protestinfo laisse carte blanche à une personnalité reformée.

Au nom de l’exécutif de l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV), la pasteure et conseillère synodale Line Dépraz réagit au récent attentat contre la rédaction de «Charlie Hebdo».

Cet événement connaît un retentissement planétaire. On ne compte plus les réactions qu’elles soient issues du monde journalistique, politique, philosophique, religieux ou autres. Comme tant d’autres, le Conseil synodal de l’EERV est profondément indigné par cet acte odieux. De son point de vue, aucune action terroriste ne saurait trouver de justification se prévalant d’une religion quelle qu’elle soit.

Photo: CC(by-sa) Valentina Calà

Le propre d’un événement, c’est d’être soumis à plusieurs clés de lecture. La tuerie qui a eu lieu dans les locaux et aux alentours de «Charlie Hebdo» ne fait pas exception. Ainsi, avons-nous entendu à plusieurs reprises que l’origine musulmane des auteurs présumés expliquait une telle violence. Ce type d’affirmation fait la part belle à l’islamophobie; plus largement, il ouvre à tout discours stigmatisant les religions et leur potentielle incitation à la violence. C’est malheureux.

Nous ne saurions minimiser l’horreur que représente cet attentat. C’est avec émotion que nous pensons à ses victimes, à leurs familles, à leurs amis. Mais à travers cet acte, plus qu’une religion, c’est l’intégrisme, l’obscurantisme et le fanatisme qu’il convient de condamner. Ces risques sont présents –mais heureusement pas inhérents– dans tout système de pensée. Dès lors, nous défendons avec force la nécessité pour tous d’un auto-regard critique sur sa propre tradition, l’exigence de dialogues interreligieux et une juste compréhension de la laïcité.

Nous devons, en commençant par nous-mêmes, oser un regard clairvoyant sur notre tradition et son évolution dans l’histoire pour déceler en quoi elle a enrichi l’humanité et en quoi elle l’a aussi mise à mal. Nul courant n’est aujourd’hui à l’abri d’être dépassé par des fondamentalistes issu de ses rangs. Prenons garde à ne pas stigmatiser les autres là où nous sommes nous-mêmes vulnérables.

Selon l’Evangile de Jésus-Christ, la vérité est une personne; c’est dire qu’elle ne se possède pas. A partir de là, osons et exigeons des dialogues intra et interreligieux de qualité. Des dialogues qui ne visent pas à trouver un consensus autour du petit dénominateur commun, mais qui permettent à chacun de confronter sa compréhension de l’autre avec la manière dont cet autre rend compte de sa religion.

Enfin, osons le préciser: la laïcité d’un état n’implique pas que toute religion doit être exclue de la sphère publique. Les Réformateurs ont défendu le caractère intime –et non privé– de la foi tout en soulignant le nécessaire engagement personnel et communautaire qui en découlait pour la paix, la justice, la sauvegarde de la création. Ils n’ont pas opté pour une Eglise qui se situerait vis-à-vis du monde. Ils ont eu l’audace de l’inscrire au cœur de la société telles deux entités capables de se féconder mutuellement pour assurer le vivre-ensemble des humains.

C’est à cela que nous voulons et devons travailler.


Genève: «Ensemble, nous disons: Dieu aime la vie et le rire»


Une célébration interreligieuse aura lieu le mercredi 14 janvier à 18h au temple de la Fusterie à Genève. Elle sera animée par Emmanuel Fuchs et Patrick Baud (Eglise protestante de Genève), Mgr Farine (Eglise catholique romaine), Jean-Claude Mokry (Eglise catholique chrétienne), François Garaï (communauté juive libérale) et Hafid Ouardiri (Fondation pour l’entre-connaissance).

La Plateforme interreligieuse de Genève, l’Appel spirituel de Genève, l’Eglise protestante de Genève, l’Eglise catholique romaine de Genève, l’Eglise catholique chrétienne de Genève, la Communauté israélite libérale de Genève GIL, la fondation pour l’entre-connaissance, la Fondation culturelle islamique et la mosquée de Genève appellent à ce moment de recueillement.


La communauté musulmane condamne ces attentats


Dans un communiqué, l’Association culturelle des femmes musulmanes de Suisse et l’Institut culturel musulman de Suisse ont présenté leurs condoléances à toutes les familles et aux proches des victimes de l’attentat contre la rédaction de «Charlie Hebdo».
«Toute la communauté musulmane condamne fermement ces actes et rappelle que l’Islam interdit tout simplement de tue», poursuit ce texte.
«Ces actes ne font pas partie d’une religion, ou d’un dogme, mais ils sont bien le fait d’individus isolés, qui tuent au nom de leur phobie et mettent cela sur le compte de Dieu.
Nous appelons toutes les personnes à ne pas céder aux intégrismes, aux racismes et à toutes les formes d’injustices et à ne pas faire d’amalgame dangereux pour la paix.»