La santé – un bien public!

La santé – un bien public!

Chaque semaine, Protestinfo donne carte blanche à un chroniqueur.

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Le professeur de théologie systématique Pierre Bühler a choisi de prendre position sur l’initiative populaire «Pour une caisse publique d’assurance-maladie», soumise au vote le 28 septembre.

Je me souviens d’un dessin du caricaturiste Chappatte paru il y a quelques années: prenant le mot «caisse» au pied de la lettre, il avait dessiné un long cortège de personnes transportant chacune avec peine une lourde caisse en bois sur le dos! C’était en lien, évidemment, avec une augmentation des cotisations d’assurance-maladie. Car ce sujet n’est pas nouveau, on le sait. Les plaintes au sujet des augmentations de primes se répètent à peu près chaque automne, et il est bien vrai que les «caisses» pèsent de plus en plus lourd sur les budgets de tous ceux qui peinent à nouer les deux bouts de mois en mois.

Mais voilà que se présente, cet automne, la possibilité de casser cette spirale: en adoptant, le 28 septembre, un système de «caisse publique d’assurance-maladie». Et pourtant, que se passe-t-il? Immédiatement, tous les adversaires se jettent sur cette initiative et la présentent comme une menace dangereuse, l’accusent de tous les maux. En gros, elle conduirait à une catastrophe: elle créerait d’immenses complications administratives, ne permettrait plus le libre choix, provoquerait du chômage, etc. Une fois de plus, on s’applique à faire peur, à grands frais.

Mieux vaut ne rien changer, car, nous dit la brochure fédérale, «le système d’assurance actuel a largement fait ses preuves». Et, à en croire les sondages, la peur du changement risque bien d’avoir l’effet souhaité: une fois de plus, la majorité du peuple suisse pourrait voter contre son propre intérêt!

Une concurrence très malsaine

Disons-le clairement: l’affirmation fédérale que le système actuel a largement fait ses preuves est une insulte à tous ceux qui ploient sous les frais toujours plus exorbitants de leurs assurances-maladie. Le système actuel favorise une concurrence très malsaine pour la santé. Plus de 60 assurances-maladie se mettent chaque année à la chasse des clients les plus profitables, en évitant les «cas coûteux» et en s’arrachant les unes aux autres les «bons risques». Aux yeux des assurances-maladie, mieux vaut être jeune et en bonne santé que vieux et malade!

Le bien-être des assurés n’est guère au centre des préoccupations des assureurs. C’est le profit qui compte, et les conseils d’administration jouissent pleinement des bénéfices. De plus, il n’est pas rare de voir des parlementaires dans ces conseils d’administration! On ne s’étonnera donc pas trop que le parlement ait recommandé le rejet de l’initiative à une forte majorité…

J’en appelle donc au peuple pour qu’il résiste à la peur qu’on veut lui injecter. À bon escient, l’initiative parle d’une caisse publique. Cela marque bien l’enjeu principal: la santé est un bien public, et il n’y a pas de raison à ce que des assureurs en fassent l’objet de leurs intérêts très privés. Je ne vois pas pourquoi ce qui fonctionne fort bien en matière d’accidents avec la Suva et en matière de protection-vieillesse avec l’AVS ne fonctionnerait pas tout aussi bien en matière d’assurance-maladie avec une caisse publique.

Cessons de porter nos lourdes caisses sur le dos! Osons le changement qui s’impose depuis longtemps!