Quelle place pour Dieu dans le nouvel hymne national?

Quelle place pour Dieu dans le nouvel hymne national?

Si les Eglises n’ont, pour l’heure, pas pris position sur le projet de nouvel hymne national suisse, certains chrétiens craignent que le concours lancé ne permette, au final, que d’évacuer les références à Dieu de notre chant patriotique.

Photo: CC(by-sa) Kmaschke

Plus de 200 projets de refontes de l’hymne national suisse ont été envoyés à la Société suisse d’utilité publique (SSUP). Un jury va en présélectionner une dizaine qui seront ensuite soumis aux votes des internautes. Un vote par SMS, téléphone et e-mail départagera les trois derniers candidats en septembre 2015, lors de la fête fédérale de musique populaire à Aarau. Enfin, la proposition gagnante sera soumise au Conseil fédéral pour qu’il l’entérine.

«Le futur hymne national s’appuiera sur le texte du préambule de la Constitution fédérale suisse, en vigueur depuis 1999 et qui évoque des valeurs telles que la démocratie, la diversité, la liberté, la paix et la solidarité», précise la SSUP dans un communiqué. «Le texte du Cantique suisse est difficile à retenir, lourd de style et dépassé par la réalité. La Suisse ne s’y reflète pas dans sa diversité ni politique ni culturelle actuelle. Cela doit changer», précise-t-elle sur CHymne.ch, le site consacré au concours.

«Le Cantique suisse clame la beauté de notre pays, usant d’un patriotisme sain et rappelant les racines chrétiennes de la Confédération», rappellent les jeunes UDC qui ont déjà communiqué leur opposition à ce projet et dénoncé la forme de ce concours qui empêche tout référendum.

Du côté des Eglises protestantes, cette crainte de voir disparaître les références à Dieu de l’hymne national n’a pas été exprimée par les institutions. Ni La Fédération des Eglises protestantes de Suisse, ni la Fédération romande des Eglises évangéliques, ni le Réseau évangélique suisse n’ont pris position sur ce sujet. «Le groupe de travail arts et culture de notre consœur suisse alémanique a invité les artistes chrétiens à prendre part au concours», souligne Michael Mutzner, secrétaire général adjoint du Réseau évangélique.

Par contre, à titre individuel plusieurs chrétiens rappellent leur attachement aux références religieuses dans l’hymne national. «Cet hymne est un cantique à la Gloire de Dieu. J’y suis très fermement attaché et je vois dans la démarche proposée une action perverse qui a comme objectif de participer à l’évacuation de la société de toute référence à Dieu au sein de notre pays», insiste Philippe Corthay, œnologue et fondateur du groupe évangélique «Forum des hommes». «J’en ai assez de voir des jeunes qui malheureusement ne connaissent pas ou rejettent les valeurs qui ont fait la force de la Suisse, se lever pour banaliser ce que nos pères ont construit et anéantir toute référence à Dieu dans notre pays. Ils veulent nous faire croire que ce que nous vivons, nous le devons à nos seules capacités et intelligences», peste-t-il «Pourquoi refuser de reconnaître la main de Dieu derrière les succès et les grâces dont nous sommes les témoins et bénéficiaires.»

Florian Baier, coprésident de la section genevoise du Parti évangélique s’avoue très attaché à notre hymne national. «Comme la maturation du vin, assimiler un hymne national est un processus qui prend du temps. Si notre hymne actuel est mal maîtrisé des Suisses, je n’imagine pas ce qu’il en serait d’un nouveau que personne ne connaît.» Il avance une hypothèse: «si les Suisses ne connaissent pas suffisamment leur hymne, c’est parce qu’il n’est pas enseigné à l’école, et c’est là qu’il faut s’interroger: sommes-nous trop frileux par rapport à notre héritage chrétien et notre identité suisse?»

Le pasteur mennonite Ernest Geiser qui consacre une partie de son temps à la prière pour et avec des parlementaires fédéraux dit avoir un avis personnel nuancé sur la question. «Si d’un côté je trouve utile que notre hymne fasse référence à Dieu (autorité supérieure et dernière), je remarque que le danger de confusion entre l’Etat et l’Eglise est réel. En tant que chrétien anabaptiste-mennonite (de tradition pacifique), je suis particulièrement sensible à cela.» Il met toutefois en garde: «un nouvel hymne supposant que de simples fables seraient à l’origine de l’élan des premiers Confédérés ne serait pas une meilleure solution!» Il souligne qu’il se pourrait aussi que le nouvel hymne fasse référence à Dieu. «Au fond, je souhaite faire confiance à la démarche en cours et que de bonnes propositions soient retenues au final», conclut-il.