La triste fin du Collège cévenol

La triste fin du Collège cévenol

Un des établissements emblématiques du protestantisme français cherche un repreneur.

Photo: Le Collège cévenol, ©Réforme/Louis Fraysse

Par Antoine Nouis, Réforme

Il y a un an, on pouvait lire dans les colonnes de Réforme que le Collège cévenol s’était doté d’une nouvelle équipe et d’un nouveau projet pédagogique qui ne manquait pas d’ambition. Le sauvetage était envisageable à condition de trouver le nombre d’élèves suffisant pour assurer un équilibre financier.

La situation n’était pas alarmante car si le collège avait des problèmes de trésorerie, il était propriétaire d’un riche patrimoine immobilier. L’année dernière, le collège comptait 120 élèves et la direction estimait qu’il lui en fallait 170 pour assurer son équilibre. Malgré de gros efforts de promotion, le nombre d’élèves a chuté à 97 et l’établissement enregistre cette année une perte d’exploitation de 400 000 euros (près de 490 000 francs suisses).

Un administrateur judiciaire a été désigné et début février, lors de l’assemblée générale, le conseil d’administration a annoncé qu’il n’était pas possible d’envisager la poursuite de son activité. Il s’est engagé à terminer l’année scolaire mais il cherche un repreneur pour la suite. Les autres établissements protestants ont été approchés mais aucun n’a souhaité s’engager dans le sauvetage de cet établissement emblématique.

La fin d’une belle histoire

Le Collège cévenol a été créé en 1938 alors qu’André Trocmé et Édouard Theiss étaient les pasteurs du Chambon-sur-Lignon. L’idée était de permettre aux enfants du Plateau de faire des études. Dès sa fondation, le collège est marqué par des innovations pédagogiques: il est mixte, ce qui est une rareté à l’époque, et il ne comporte ni murs ni grilles. Après la guerre, il s’agrandit et accueille, en plus des enfants de la région, des fils et filles d’expatriés.

Le nombre d’élèves commence à diminuer à partir des années 1980. Le collège vit sur sa réputation et connaît un déclin progressif. C’est l’époque où les internats sont moins recherchés. En outre, des collèges et des lycées publics se construisent dans la région. L’équipe dirigeante est alors incapable d’adapter son projet à cette réalité nouvelle.

En 2009, la situation est tellement dégradée qu’on envisage un dépôt de bilan. Au nom de l’histoire du collège, une nouvelle équipe dirigeante qui ne se résigne pas à la fermeture de l’établissement arrive dans le conseil d’administration et met en place un nouveau projet pédogogique et une nouvelle communication. Le plan commence à porter ses fruits puisque, à la rentrée 2011, pour la première fois depuis des années, le nombre des inscrits est à la hausse.

Mais le 18 novembre 2011, une élève, Agnès Marin, est assassinée par un garçon du collège. L’affaire a un retentissement national et le collège ne s’en remettra pas. La grande majorité des familles a conservé sa confiance à l’équipe dirigeante mais il est devenu difficile de recruter de nouveaux élèves: «Quand des parents cherchent un internat pour leur enfant et qu’ils envisagent de l’inscrire au Collège cévenol, ils font une recherche sur Internet et la première chose qu’ils apprennent est la mort de la jeune Agnès. On comprend qu’ils ne soient pas encouragés à poursuivre», déclare un de ses responsables.

Le conseil d’administration et l’administrateur judiciaire cherchent désormais un repreneur, si possible dans le domaine de l’éducation, avec le soutien actif d’Éliane Wauquiez, la maire du Chambon-sur-Lignon. Le site est magnifique et les bâtiments sont bien placés. Si l’établissement redémarre, ce sera forcément sous un autre nom. Une belle page de l’histoire du protestantisme se tourne.txt

Cet article a été cité dans :

Le quotidien La Tribune de Genève du 26 février 2014